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2013/2014
Questions Numériques 2013/ 2014 : les promesses du numérique
Questions numériques


 Un cycle annuel de prospective créative
Quelles sont les émergences puissantes, les opportunités transformatri­ es,
                                                                         c
les questions difficiles, les ruptures et les basculements qui vont marquer
les prochaines années ? Ces questions sont essentielles pour anticiper plutôt
que réagir. Chacun d’entre nous se les pose régulièrement, à sa manière,
dans son activité. Mais trop souvent, sans y passer le temps nécessaire, sans
les partager suffisamment, sans tirer parti des idées des autres.
C’est pourquoi la Fing propose une démarche collective, annuelle,
qui s’instal­ e durablement dans le calendrier : convier décideurs, chercheurs
            l
et innovateurs à identifier ensemble les “questions numériques” des années
à venir – et imaginer les manières d’y répondre.
En bref, prendre le temps d’anticiper.



 Une publication, un outil, un processus
Questions Numériques est à la fois :
	   Un rendez-vous annuel : la publication du “Cahier d’enjeux”  
et la mani­ estation publique associée.
          f
	  Un outil au service de la réflexion stratégique : le Cahier d’enjeux
fournit la matière prospective de dossiers dans les médias, d’interventions
publiques, de séminaires au sein de grandes organisations…
	  Un processus continu de coproduction, qui implique plusieurs  
centaines d'acteurs issus de tous les horizons : directions de l’inno­ ation  
                                                                     v
de grands groupes, acteurs publics nationaux et territoriaux, pôles de  
compétitivité, chercheurs, entrepreneurs, designers, têtes de réseaux,  
journalistes…



 Questions Numériques Sur le web
www.fing.org/questionsnumeriques
Crédits

 Coordination

Daniel Kaplan  Véronique Routin  Jacques-François Marchandise   
Margaux Pasquet  Renaud Francou.


 Accompagnement méthodologique
Nod-A


 Animation de la production collaborative et Rédaction
Marine Albarede  Amandine Brugière  Loup Cellard  
Jean-Michel Cornu  Fabien Eychenne  Renaud Francou  
Fabienne Guibé  Hubert Guillaud  Daniel Kaplan  
Aurialie Jublin  Carole Leclerc  Lucie Le Moine  Amadou Lo  
Jacques-François Marchandise  Thierry Marcou  Juliette Maroni  
Françoise Massit-Folléa  Charles Népote  Philippe Nikolov  
Pierre Orsatelli  Denis Pansu  Margaux Pasquet  Valérie Peugeot  
Véronique Routin  Rémi Sussan  Thomas Thibault  
les élèves de l’École Boulle.


 Accueil des Ateliers
Frank Kresin et l’équipe de la Waag Society (Amsterdam)   
PICNIC (Amsterdam)  L’École Boulle  Vaiana Le Coustumer  
et Vincent Rossin  Pôle Média de la Belle de Mai  Cap Digital


 Conception Graphique
Isabelle Jovanovic


 Illustrations
Merci aux élèves de l'école Boulle


 Photos
Tous droits réservés


 Fabrication
NH Impression




Fondation Internet Nouvelle Génération
www.fing.org - www.internetactu.net
 8, passage Brulon  75012 Paris  (+) 33 1 83 62 98 28  infos@fing.org
 CMCI  2, rue Henri Barbusse  13001 Marseille  (+) 33 4 91 52 88 08
Sommaire

     Introduction     L'œuvre des promesses ?	                                                4




	                                                           	                                 8
    	             “ Une expérience plus humaine des technologies ”	                          10
        	         “ Un meilleur usage du temps ”	                                            14
        	         “ La dématérialisation heureuse ”	                                         18
        	         “ Un monde plus sûr grâce à l'internet ”	                                  24


	                                               	                                            26	
        	         “ Tous auteurs, créateurs, innovateurs, producteurs ”	                     28
        	         “ Une intelligence collective ”	                                           34
        	         “ La fabrication numérique personnelle ”	                                  38
        	         “ Une innovation ascendante, collaborative, ouverte ”	                     42


	                                                             	                              44
        	         “ Une mobilité plus libre, plus diverse, plus riche, plus durable ”	       46
                	 “ Le numérique au service d'une croissance plus verte et plus durable ”	   52
            	     “ Une planète plus smart ”	                                                58
                	 “ Un meilleur commerce, plus transparent, plus confiant, plus fluide ”	    60


	                                                    	                                       62
                	 “ Un corps plus beau, plus fort, plus sain… et pour moins cher ”	          64
                	 “ Une identité numérique sûre, unifiée, protectrice ” 	                    70
                	 “ Le numérique, un nouvel Eden pour les relations humaines ”	              72
                	 “ Bien vieillir grâce au numérique ”	                                      74


	                                         	                                                  76
                	 “ Apprendre tout le temps, tout ce que l'on veut, n'importe où ”	          78
                	 “ Des jeux pour nous transformer et transformer le monde ”	                84
                	 “ Une démocratie retrouvée, augmentée, étendue ”	                          88
                	 “ Le numérique, un atout au service du développement ”	                    90
                	 “ L’ascenseur social numérique ”	                                          92


  internet actu     Pourquoi ne savons-nous pas résoudre
les grands problèmes ?	                                                                      94


     La Fing     un think tank de référence	                                                 96
Depuis qu’il se propose au monde comme support de la “troisième révolution industrielle”,
le monde du numérique n’est pas avare de promesses. À un moment ou à un autre, ses gourous,
ses industriels, les institutions, ont annoncé la fin des crises et celle du travail, la paix sociale et
mondiale grâce au miracle de l’échange et de la compréhension réciproque entre les hommes,
une démocratie revitalisée, l’accès des pays les moins avancés au développement, l’avénement
d’une conscience mondiale face aux défis environnementaux…
… Mais avant de lever les yeux au ciel devant tant de naïveté, demandons-nous d’où viennent
ces promesses, qui les entend, ce qu’elles produisent – et admettons que, ce faisant, nous nous
tendons aussi à nous-même un miroir.


 Faire des promesses, les entendre                             Les laboratoires de recherche, les pôles de compé­
                                                               ti­ ivité, mais aussi les communautés de dévelop­
                                                                 t
Les travaux de prospective technologique décrivent             peurs, hackers et autres makers, produisent des
volontiers l’avenir comme le produit de l’avance-              paris osés en même temps qu’ils s’attellent à les
ment mécanique des technologies, appliqué à des                relever. Parce que leur ambition dépasse la plupart
contraintes ou des défis extérieurs à toute volonté            du temps le seul exploit technique, ces défis lancés
(écologiques, économiques, démographiques…).                   à soi-même nourrissent à leur tour les promesses
Ils peinent à rendre compte des formes diverses,               de l’industrie et du politique.
changeantes et généralement imprévues d’appro-
priation de ces technologies par leurs utilisateurs.
Ils pensent automatisation, optimisation, perfor-               L’empreinte de nos désirs et de nos rêves
mance, plutôt que transformation.
                                                               Si ces promesses se contentaient d’enluminer les
L’approche par les “promesses” s’intéresse, presque            d
                                                               ­ iscours de l’offre, elles ne mériteraient pas d’atten­
par nature, aux transformations. Une promesse                  tion particulière. Mais l’innovation internet est
imagine un changement profond et positif des                   multipolaire et distribuée, les transformations
systèmes auxquels elle s’applique. Elle permet                 numériques touchent presque tous les domaines
de débusquer, dans le passé comme dans l’ave-                  de l’activité humaine, les frontières entre offre et
nir, ­ ’esprit et le désir humains. Elle est formulée
     l                                                         demande s’y brouillent. Il paraît dès lors délicat de
et portée par quelqu’un, en direction de publics,              savoir qui promet quoi à qui, aucun acteur n’ayant
l
­ ’objectif consistant à mobiliser ensemble émet-              seul les moyens de tenir ses promesses.
teurs et récepteurs. Voilà ses forces.
                                                               L’abaissement des frontières entre le haut et le bas
Parties prenantes de l’offre technologique, intéres­           s’accompagne d’une plus grande porosité entre
sés au succès de l’internet ou de la téléphonie                ceux qui parlent et ceux qui font. Les promes­
mobile, les Etats et les territoires racontent le              ses des intellectuels prophétiques ne sont pas
numé­ ique levier de la croissance (durable) et de
       r                                                       toujours si éloignées des promesses en actes des
la compétitivité, de la modernisation adminis-                 praticiens mutiques. Explorer ce champ, c’est faire
trative et démocratique, de l’inclusion dans une               la jonction entre l’emphatique et le naïf, c’est tra-
“société de la connaissance” forcément meilleure.              verser (pas forcément sans plaisir) des océans de
De la ­ Déclaration d’indépendance du cyberes-
        “                                                      storytelling et de vaporware et y croiser, aussi, des
pace” (1996) aux partis pirates, les militant ont eux          horizons ­ ésirables, des aspirations venues de loin,
                                                                         d
aussi paré le numérique de caractéristiques idéo-              des ­ ésirs en actes.
                                                                    d
logiques, qu’elles soient libérales, collectives, liber-
taires ou sécuritaires.                                        Dès lors, cet objet “promesses” devient plus collec­
                                                               tif que jamais. Il porte des promesses qui nous
Les grandes entreprises technologiques ont égale­              sont faites par nous-mêmes. Ici le premier “nous”
ment construit leur “grand récit”, souvent relayé              désigne le public, les usagers directs ou indirects,
et enrichi par l’écosystème des entrepreneurs                  les bénéficiaires, les récipien­ aires des promesses ;
                                                                                              d
inno­ ants  : “pensez différent” (Apple), maximi-
     v                                                         un second “nous” désigne tous ceux qui endossent
ser son potentiel (Microsoft), “une planète plus               une part des intentions actives à l’oeuvre dans
intelligente” (IBM)… Loin de s’adresser seulement              le réseau  : intentions militantes, innovantes,
aux consommateurs supposés crédules, ces récits                encyclo­ édiques, militaires, servicielles, environ­
                                                                       p
tiennent ­ ussi lieu de message aux marchés et aux
          a                                                    nementales, créatives, et de toutes sortes, pour peu
investisseurs, et de leviers de mobilisation pour              qu’elles s’énoncent à destination de tiers.
leurs équipes. Ils sont, aussi, des prises de risque.



                                                           6
Les promesses qui “tiennent” expriment des espé­               Mais de la lecture d’ensemble de cette production
rances et des rêves, des croyances et des intui­ ions
                                                 t             collective, quelques intuitions globales émergent
peu ou prou partagées. Elles nourrissent le désir, la          également.
créativité et ­ ’énergie entrepreneuse ­ utant qu’elles
              l                        a
en émanent. Elles inspirent des choix concrets,
techniques, économiques ou politiques. Au travers               Petites et grandes ambitions
d’elles, nous racontons le futur que nous pensons
construire. Il faut prendre ces promesses au sérieux,          Quand on part à la recherche de la manière dont
même lorsqu’elles ne se réalisent pas.                         s
                                                               ­ ’expriment les promesses numériques, en parti­
                                                               culier de la part d’institutions et d’acteurs politiques,
                                                               une fracture saute aux yeux  : celle qui sépare le
 Des promesses pour inventer demain                            niveau d’ambition des Américains et des Européens.

Fortes de cette conviction, sous l’impulsion de la             Pour la Commission Européenne, comme pour la
Fing, plus de 300 personnes ont travaillé entre                p
                                                               ­ lupart de ses gouvernements, la fonction du nu-
mai et octobre 2012 à identifier les “promesses                mérique consiste :
numériques” les plus structurantes des dernières
années, puis à en tirer le bilan pour se projeter vers            à “relever les défis auxquels la société doit faire
l’avenir.                                                       face, tels que le changement climatique et le vieillis­
                                                                sement de la population” (Digital Agenda, 2010),
À partir d’un premier travail de défrichage mené au
printemps, nous avons consolidé le matériau issu                    à “faire de l’Union européenne l’économie de
des ateliers et des échanges en ligne pour conver-              la connaissance la plus compétitive et la plus
ger autour de 21 “promesses”. Equipés alors de nos              dynamique du monde d'ici à 2010, capable d’une
lampes de spéléologues, nous sommes partis à la                 croissance économique durable accompagnée
r
­ echerche des expressions de ces promesses, des                d’une amélioration quantitative et qualitative de
plus classiques aux plus hétérodoxes. Fin août, le              l
                                                                ­ ’emploi et d’une plus grande cohésion sociale ”
matériau de base des ­ teliers “Questions Numé-
                         a                                      (Stratégie de Lisbonne, 2000).
riques” était publié en ligne.
                                                               Dans cette vision, le numérique constitue un
En septembre et octobre 2012, trois ateliers orga­             contexte donné auquel nous devons nous adapter,
nisés à Amsterdam (avec la Waag Society et la mani-            qui peut par ailleurs nous aider à résoudre les pro-
festation PICNIC), Marseille (avec Lift) et Paris, ont         blèmes ­ ’aujourd’hui et de demain – notamment à
                                                                       d
revisité les promesses que les participants consi-             exploiter de nouveaux gisements d’efficience et de
déraient comme les plus parlantes. Répartis par                productivité.
petits groupes, ils ont répondu à quatre questions
successives :                                                  Il en va tout autrement de l’autre côté de
                                                               l
                                                               ­ ’Atlantique. Dès le début des années 1990, les
   Quel bilan peut-on tirer de la promesse ? Qu’est-           “autoroutes de l’information” promues par Al Gore
 ce qui a marché ou non, qu’est-ce qui nous a sur-             rencontrent les procla­ ations enflammées des
                                                                                         m
 pris, qu’avons-nous appris ?                                  coauteurs de la “Magna Carta pour l’ère de la
                                                               connaissance” (1994) annonçant “une extension
   Qu’est-ce qui, demain, changera le contexte                 sans précédent de la liberté humaine.” Les auteurs
 même dans lequel la promesse peut se formuler                 de Wikinomics (2006) annoncent “un âge d’or, aussi
 ou se reformuler, se réaliser ?                               important que la Renaissance ou l’émergence de
                                                               la démo­ ratie à Athènes.” Le rapport de Rocco et
                                                                         c
   Ayant appris ce que nous avons appris, comment              Bainbridge (2003) qui définit la stratégie techno­
 reformulerions-nous pour demain une promesse                  logique de la ­ ational Science Foundation s’intitule
                                                                               N
 à la fois ambitieuse, tournée vers l’avenir et                “Augmenter la performance humaine” et puise
 crédible ?                                                    dans des sources proches de la science-fiction
                                                               et du transhumanisme. Plus tard, la Secrétaire
    Enfin, toujours instruits par l’expérience, que            d’Etat Hillary ­ linton défend le carac­ ère ouvert
                                                                                C                      t
 f
 ­ audrait-il faire pour tenir cette nouvelle promesse ?       de l’internet au nom de ­ l’opposant qui utilise les
                                                                                          “
                                                               médias sociaux pour ­ rganiser une manifes­ ation
                                                                                       o                     t
Vous tenez le résultat de ce travail entre les mains.          en Egypte  ; l’étudiante qui envoie à sa famille
Prenez-le comme un support de travail, d’inspi-                des photos du semestre qu’elle vient de passer à
ration et d’aspiration, d’action enfin. Faites-en un           l’étranger  ; l’avocat vietnamien qui blogue pour
outil de travail, plutôt qu’une ­ éférence intangible.
                                r                              dénoncer la corruption  ; l’adolescent ­ méricain
                                                                                                         a



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harcelé par ses condisciples et qui trouve du                  p
                                                               ­ ourtant, l’expérience quotidienne de la mobilité
r
­ éconfort en ligne ; la petite entrepreneuse du ­ enya
                                                 K             a fort peu changé. Presque tous les enseignants et
qui gère son compte en banque sur son mobile  ;                la grande majorité des familles utilisent l’internet
la philosophe chinoise qui lit des revues scien­               à des fins éducatives  ; mais rien, ou presque, n’a
tifiques pour sa thèse  ; le scientifique brésilien qui        changé dans les systèmes éducatifs. En ligne, nous
partage ses données en temps réel avec ses collè­              devenons tous auteurs, innovateurs, producteurs,
gues de l’autre bout du monde  ; et les milliards et           nous savons y produire de l’intelligence collective
milliards d’inter­ ctions quotidiennes en ligne au
                  a                                            à des échelles sans précédent ; pourtant nous nous
travers desquels les gens communiquent avec ceux               montrons toujours aussi incapables de répondre
qu’ils aiment, suivent l’actualité, font leur travail et       aux grands défis collectifs, toujours plus inquiets
participent aux débats qui ­ hangeront leur monde.”
                               c                               face à l’avenir…
Imagine-t-on une femme politique européenne
prononcer un tel discours ?                                    Autrement dit, beaucoup de promesses sont à la
                                                               fois tenues (les pratiques annoncées se sont maté-
À première lecture, on pourrait en conclure que                rialisées, souvent plus vite que prévu) et trahies
les Américains parlent de politique quand les                  (les difficultés du quotidien, les injustices sociales,
Européens parlent d’économie. Pourtant les défis               les aberrations écono­ iques, les impasses éco-
                                                                                       m
que se lancent les Américains sont évidemment                  logiques, n’ont pas plus de solution aujourd’hui
écono­ iques ; la vraie différence réside dans leur
       m                                                       qu’hier). Tout a changé, et rien n’a changé !
niveau d’ambition. Pour eux, la technologie a pour
fonction de transformer  en profondeur ce à quoi               Il serait trop facile de mettre cette disjonction
elle s’applique, d’en changer les termes de réfé-              sur le compte de l’inertie, voire de la résistance
rence. Elle propose des nouvelles frontières, que              des pouvoirs établis. Elles existent, bien sûr. Mais
des entreprises innovantes s’en iront conquérir.               tournons nos regards vers quelques marchés que
Sans ­ écessairement adhérer aux discours les plus
      n                                                        le numérique a déjà transformés, profondément
exaltés, on peut trouver dans cette ambition l’une             et pour toujours, tels ceux des biens culturels
des raisons de la domination constante de l’inter-             et des médias. Les jeux d’acteurs et les modèles
net par les géants américains, de la capacité d’ini-           économiques ont effectivement changé, des nou-
tiative et de renouvel­ ement de ses scientifiques
                       l                                       veaux acteurs ont émergé. Cela a-t-il pour autant
comme de ses entrepreneurs.                                    produit un nouvel âge d’or de la création, diffusé
                                                               beaucoup plus largement la culture et la connais-
                                                               sance, rendu la plupart des médias plus incisifs et
 Tout change pour que rien ne change ?                         plus indépendants des pouvoirs économiques et
                                                               politiques ? On a le droit d’en douter.
Certaines promesses du numérique n’ont claire-
ment pas été tenues. Le numérique contribue à                  Alors, que manque-t-il ? Une volonté qui dépasse la
déstabiliser les dictatures, mais il n’a pas résolu            technologie et qui, sans doute, en oriente pour par-
la crise des démocraties. Il n’a rendu la crois-               tie le développement et le déploiement.
sance ni plus pérenne, ni plus écologiquement
soutenable  – au contraire, il a rendu possi­ les
                                               b               À elle seule, la technologie, même massivement
les dérèglements des marchés financiers qui                    appropriée, ne suffit pas à résoudre des ­ roblèmes
                                                                                                        p
ont déclen­ hé la crise que nous vivons. Il n’a pas
            c                                                  dont l’origine puise loin dans l’histoire ainsi que
sorti les pays les moins avancés du sous-dévelop­              dans l’organisation politique et économique de
pement. Ces promesses étaient-elles hors de                    nos sociétés. Si l’on veut un changement systé­
portée ? A-t-on mal utilisé les technologies ? Ou              mique, alors il faut décrire ce changement et y
sinon, que manque-t-il d’autre ?                               appliquer une volonté forte, tenace, largement
                                                               partagée tout en acceptant la confrontation.
Plus intéressant, plus troublant aussi : la disjonc-
tion que l’on constate dans plusieurs domaines                 Nous assignons habituellement aux institutions
entre, d’un côté, le développement rapide et ­ assif
                                              m                p
                                                               ­ olitiques la tâche de dégager et de mettre en
d’outils, de services et de pratiques numériques               oeuvre la volonté collective. Mais nous doutons
et, de l’autre, des effets systémiques faibles, voire          a
                                                               ­ ujourd’hui de leur capacité à accomplir l’un
nuls, voire carrément paradoxaux. Le numérique                 comme l’autre. D’où l’orientation qui ressort de la
a libéré notre temps de multiples contraintes  ;               plupart des groupes qui ont travaillé sur les pro-
or nous nous sentons toujours plus pris par le                 messes : demander aux technologies de distribuer
temps. La dématérialisation a considé­ ablement
                                          r                    plus largement l’information, les capacités d’action,
progressé dans nos vies quotidiennes comme                     le pouvoir, pour faciliter l’émergence et la crois-
dans les organisations, sans vraiment simplifier               sance des alternatives.
nos vies, ni la gestion des entreprises, ni non plus
réduire la consommation de papier. Le numérique
a transformé nos mobilités, l’organisation de
notre temps, nos manières de communiquer… et



                                                           8
 Le risque de la captation
                                                                Voilà pourquoi les promesses ont tant d’impor-
Mais cette distribution, il faut également la vouloir !         tance, pourquoi il faut en douter et les chérir à
Elle n’est pas le produit mécanique de la diffusion,            la fois  – et ­ ourquoi nous avons choisi d’en faire
                                                                              p
même quasi-générale, des appareils numériques et                à leur tour le matériau et le produit d’un travail
des accès au réseau.                                            collectif.

La technique nous demande elle-même beaucoup,                   En définitive, c’est peut-être la reformulation de la
et cela coûte plus aux uns qu’aux autres. Apprendre             p
                                                                ­ romesse associée au jeu (titre originel : “Des jeux
à l’utiliser, la gérer, la sécuriser, résoudre les innom-       pour nous transformer et transformer le monde”)
brables petits et grands problèmes quotidiens                   qui exprime le mieux ce que nous devrions accom-
qu’elle produit, taxe notre temps et notre attention.           plir à l'aide du numérique. Le but du jeu, si l’on ose
En faire un usage autonome, actif, productif, s’avère           dire, ne consisterait plus à ­ ’évader de la réalité, ni
                                                                                             s
plus exigeant encore. Le temps, les moyens et les               à aborder de manière ludique des sujets sérieux,
compétences nécessaires sont très inégalement                   mais “à rendre la réalité elle-même plus joueuse.”
distribués  – d’autant que, bien souvent, les plus              Belle promesse…
pauvres (à l’échelle locale et mondiale) paient leurs
pratiques numériques plus cher, en temps comme                  Daniel Kaplan
en argent. Le numérique distribue-t-il du ­ ouvoir “à
                                                p               et Jacques-François Marchandise
tous” ou bien servira-t-il d’abord à permettre à de
nouvelles élites de remplacer les anciennes ?

L’intervention de la “multitude” dans la production
de connaissances et de créations, dans l’innovation
et la création de valeur, dans la mise en discussion
de toutes sortes de choses – des effets secondaires
de tel médicament aux secrets diplomatiques
américains –, constitue bel et bien l’une des trans-
formations majeures qu’a produit le numérique.
Mais cette intervention s’appuie en général sur
des plates-formes, généralement privées, dont elle
constitue la matière première et la richesse. Fondé
sur la contribution volontaire, ou du moins consen-
tie, de leurs utilisateurs, leur modèle économique
repose sur la captation la plus complète et durable
possible de l’attention, de l’information, du travail
des individus. Au lieu de s’appliquer à des enjeux
collectifs, cette formidable énergie se voit absorbée
dans des sortes de trous noirs, dont elle ne ressort
que sous la forme de valeur marchande  – car “si
vous ne payez pas, c’est que vous êtes le produit.”

Pas étonnant, du coup, que l’on retrouve autour de
la plupart des promesses une attention croissante
à la maîtrise des technologies et des contenus par
les individus, au choix, à la montée en compétence
et enfin, à l’équilibre entre contribution et “retour”
(
­ symbolique ou tangible) aux contributeurs comme
à la communauté.

                          * * *

Les premières utopies du cyberespace partaient
de l’idée que les contraintes physiques, mais aussi
sociales et économiques, du “monde réel”, dispa­
raîtraient dans cet espace sans gravité ni frotte-
ment, sans rareté ni conflit d’usage, infiniment
plastique et reconfigurable. Inévitablement, la
rencontre avec la réalité a déçu. Et pourtant, le
numé­ ique reste encore le lieu où se racontent et
       r
s’instancient les espérances contem­ oraines, celui
                                       p
vers lequel convergent les créateurs et les innova-
teurs qui ne se satisfont pas de l’état du monde.



                                                            9
RD'HUI                                     RD'HUI                                   RD'HUI                                     RD'HUI
              OU                                         OU                                       OU                                         OU             




                                                  HIER AUJ



                                                                   DE
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                                                                                                                                        IN
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                       RE                                         RE                                       RE                                         RE
              S-DEMA                                     S-DEMA                                   S-DEMA                                     S-DEMA


    une promesse                                  son bilan                           quelle promesse                              quelles pistes
                                                                                       pour demain ?                                 d'action ?




                                         .……………………………………………………………………………
                                                                                                                                …………………………………………………………………………
                                                                               .……………………………………………………………………………………
                                         .……………………………………………………………………………
                                                                                                                                …………………………………………………………………………
Une promesse non traitée                                                       .……………………………………………………………………………………
   (à vous de jouer !)                   .……………………………………………………………………………                                                         …………………………………………………………………………

                                         .……………………………………………………………………………                                                         …………………………………………………………………………
                                    10                                                                                  11
R D' H U I
                                                 OU              




                                          HIER AUJ



                                                                  DE
                                 hier,                                        une promesse




                                                                    MAIN AP
                                             IN
                                                                RE
                                                 S-DEMA




                                                                 Le meilleur ordinateur est un serviteur
                                                              calme et invisible. (…) Les technologies les plus
                                                              profondes sont celles qui disparaissent.
                     Les hommes ont le sentiment              Elles se fondent dans la trame de la vie
           d’avoir perdu le contact avec la réalité.          quotidienne jusqu’à en devenir indiscernables”
          Le développement de la polysensualité,              Marc Weiser, 1991
     du soft touch, de l’encapsulation des odeurs,
          ou d’une façon plus générale, le recours
    à des matières qui font appel à tous nos sens,
       sont une réponse à cette perte de contact”                Si aujourd’hui la technologie est froide,
                   Monique Large, Dezineo, 2004               l’enjeu des années à venir est de la réchauffer
                                                              de la chaleur humaine, celle qui donne sens
                                                              à la vie. C’est seulement à cette condition
                                                              qu’elle constituera une extension du domaine
                                                              de la vie.” Didier Fass, Futur 2.0, 2007



                                                      R D' H U I
                                                 OU              
                                          HIER AUJ



                                                                 DE




                        à l’heure                                             du bilan
                                                                   MAIN AP




Les gens ont massivement adopté les tech-                                 Les technologies numériques participent
                                             IN




                                                                RE
nologies numériques, souvent ­ u-delà de
                                 a               S-DEMA                  à l’accélération constante de nos vies, à
ce qu’espéraient les industriels et en avance                          la surcharge informationnelle, au déficit
vis-à-vis des organisations. Ces technologies                     attentionnel, à la standardisation d’une ­ pensée
                                                                                                             “
répon­ ent visiblement à des aspirations humaines
       d                                                      Powerpoint”… Elles contribuent à une forme de dés-
profondes en matière de communication, d’expres-              humanisation de nos sociétés  : des ­ ystèmes auto-
                                                                                                     s
sion, de coopération.                                         matiques remplacent les inter­ ctions humaines
                                                                                                 a
Dans de nombreux domaines, notre expérience des               entre les clients et les entreprises (voire au sein des
technologies s’est améliorée et enrichie. Mais elles          organi­ ations) et menacent la vie privée. Leur inter­
                                                                     s
nous soumettent également à de lourdes contraintes.           action produit ­ arfois des “ émergences ” hors de tout
                                                                              p
Nous devons sans cesse apprendre à utiliser de nou-           contrôle, comme on a pu le constater sur les marchés
veaux appareils et logiciels. L’obsoles­ ence program­
                                       c                      financiers.
mée consomme du temps, de l’attention et de l’argent.         Nous avons beaucoup appris sur la manière dont
Nous sommes souvent seuls quand les technologies              nous co-évoluons avec nos technologies. À l’heure où
dysfonctionnent.                                              celles-ci nous permettent d’intervenir sur nos esprits,
                                                              nos corps, ainsi que sur certains des fonde­ ents de
                                                                                                          m
                                                              nos sociétés, cette connaissance prend une impor-
                                                              tance croissante. Il faut mieux la partager, et mieux
                                                              l’utiliser en amont de la conception de nouvelles tech-
                                                              nologies ou de nouvelles appli­ ations.
                                                                                             c




                                                         12
Ce qui a marché…                Ce qui n'a pas marché…
                                 Une adoption massive               Les robots personnels (pour l’instant),  
            des techno­ ogies numériques, par presque 
                      l                                           l’informatique “vestimentaire”…
                         toutes les catégories sociales.
                                                                    La technologie exige toujours beaucoup  
                 Les technologies numériques relient              de notre temps, de notre attention et de notre argent.
          les hommes, facilitent leur communication               Nous acceptons souvent des machines  
                         et leur collaboration, servent           ce que nous n’accepterions jamais d’un humain,  
      de véhicules à leur expression et leur créativité.          et avons tendance à assumer la responsabilité  
               Elles ont donné naissance à des milliers           de leurs dysfonctionnements.
      de services et d’outils très utiles. Nous avons pu             Certains des pires aspects d’un développement
   “externaliser” auprès d’elles de nombreuses tâches,            techno-centré subsistent : l’obsolescence program­
    ainsi que des portions entières de notre mémoire.             mée, l’indifférence aux effets environnementaux,
           Les interfaces deviennent plus “naturelles”,           l’excès de richesse fonctionnelle et de complexité…
       fondées sur la voix, le toucher, le mouvement…               Nous sommes plus déprimés aujourd’hui  
      Globalement, malgré certaines exceptions, nous              qu’avant de recevoir toutes ces technologies –  
        savons mieux qu’avant créer des applica­ ions
                                                   t              mais celles-ci n’en sont pas forcément  
                        accessibles et faciles à utiliser.        responsables…


                           Ce qui nous a surpris…                 Ce que nous avons appris…
             La lenteur de l’évolution des paradigmes               La technologie nous transforme à mesure  
         technologiques : l’interface “fenêtres-souris”           que nous la transformons. Elle nous force à discuter  
                                      a plus de 30 ans !          de ce qui est ou n’est pas humain, en sachant  
              Les technologies numériques demeurent               que la réponse évoluera dans le temps et  
  très sujettes aux pannes, et ceux qui les produisent            selon les cultures.
                   n’en assument pas la responsabilité.              Les interfaces ne servent pas qu’à rendre  
     La publicité de soi à l’aide des outils numériques,          les technologies utilisables, elles définissent la nature
            malgré la crainte ( justifiée) d’une érosion          de ce qu’on peut faire avec et au travers d’elles.  
                  rapide des frontières de la vie privée.         Il restera difficile de trouver le bon équilibre  
                                                                  entre la richesse fonctionnelle, la simplicité et
         Moins de temps pour réfléchir : le numérique 
                                                                  l’ouverture aux usages imprévus.
              semble tout entier tourné vers l’action !
                                                                    La technologie continue d’évoluer plus  
           Les “technologies émotionnelles”, les robots 
                                                                  vite que les coutumes sociales et que  
                         amicaux, Tamagotchi, Furby…
                                                                  les organisations, ce qui peut exclure certaines  
        Les phénomènes “émergents” sur des marchés                parties de la population.
                     entièrement automatisés, tels que 
                                                                    Les machines nous aident à moins prendre soin  
              le “flash crash” du NASDAQ en mai 2010.
                                                                  des autres, par exemple de nos parents vieillissants.
                             Les captcha : “Prouvez-moi 
                                                                    La technologie ne deviendra plus “humaine”  
                               que vous êtes humain !”
                                                                  que si ceux qui la conçoivent, la produisent  
                                                                  et l’exploitent ont des buts et des comportements
                                                                  “humains”…

                                                         RD'HU
                                                    OU                I
                                                    J



                                                                      D
                                             HIER AU




                                                                        EMAIN AP




                            demain,                                                ce qui va changer
                                               IN




                                                    RE
                                                      S-DEMA

  Ce qui va changer                                               économie
Technologie                                                         Appauvrissement des classes moyen­ es… et des
                                                                                                            n
                                                                  gouvernements   Environ­ ements et ­ ystèmes “intel-
                                                                                            n            s
  Informatique ambiante, objets et espaces “intel­
                                                                  ligents”  : maisons, villes, réseaux…   Dépen­ ance
                                                                                                                  d
ligents”, maturité des robots personnels   Big data,
                                                                  croissante ­vis-à-vis des techno­­ logies numériques 
extraction automatique de connaissances, prévision
                                                                    Extension du “Do It Yourself”   Pression en faveur
temps réel, décision algorithmique   Convergence
                                                                  d’objets plus sobres en énergie, plus durables.
“Nano-Bio-Info-Cogno”   Des interfaces “tangibles”,
utilisant nos 5 sens   Améliorations de la reconnais-             société
sance de la parole et de la compréhension du langage                Vieillissement au Nord   Arrivée aux commandes des
naturel   “Affective computing”  : les ordinateurs ap-            “digital natives”   Une consommation plus définie par
prennent à détecter et à communiquer des émotions                 des valeurs   Des relations sociales hybrides, numé-
  Bio-inspiration…                                                riques et physiques à la fois.

                                                                     …et ce qui ne changera sans doute pas
                                                                    La barrière des langues, malgré les efforts en matière
                                                                  de traduction automatique   Notre sentiment de man-
                                                                  quer de temps.

                                                             13
R D' H U I
                                                 OU              




                                          HIER AUJ



                                                                DE
         quelle promesse                                                    pour demain




                                                                  MAIN AP
                                            IN
                                                              RE
                                                 S-DEMA




Les technologies numériques seront conçues afin de :
 Donner plus de capacités aux humains, plutôt que de les remplacer ou de les ignorer
 Aider les humains à atteindre de nouvelles frontières, personnelles ou collectives
 Multiplier et enrichir les interactions et les collaborations entre humains
 Élargir l’espace des possibilités futures, plutôt que de le délimiter
  Montrer aux humains du respect, faire preuve d’empathie, et les aider à faire preuve de résilience quand
elles tombent en panne
  Rendre leur accès et leur apprentissage aisés, tout en reconnaissant la diversité des utilisateurs et  
en permettant à ceux qui le désirent de comprendre leur fonctionnement, voire de les bricoler.



                                  La promesse à l’œuvre

                    L’important n’est pas tant que              Cette dimension, à la fois existentielle
            les machines sympathisent avec nous,             et philosophique, touche à la transformation
     qu’elles deviennent nos amis, mais que nous             de l’humain en un objet numérique, mais aussi
                   nous sympathisions avec elles.”           en un objet du numérique, c’est-à-dire
                              Ben Bashford, 2012             en un être culturel numérique, convertible,
                                                             extensible et capable de circuler de manières
                                                             inédites grâce à la convergence de la technologie
            En acquérant le langage, les humains
                                                             et du corps.”Milhad Doueihi,  
 n’ont pas seulement appris à écouter, mais bien
                                                             Pour un humanisme numérique, 2012
    à parler. En apprenant à lire, nous apprenons
   à écrire. Et à mesure que notre réalité devient
  de plus en plus numérique, nous ne devons pas                 Nous sommes tous des chimères,
seulement apprendre à utiliser des programmes,               des hybrides de machines et d’organismes
        mais bien à les créer.” Douglas Rushkoff,            vivants ; bref, des cyborgs. Dans un monde
                Program or be programmed, 2010               de cyborgs, les gens pourraient vivre sans
                                                             s’effrayer de leur ressemblance avec
                                                             les animaux comme avec les machines, sans
                                                             s’inquiéter de leurs identités toujours partielles
                                                             ni de leurs points de vue contradictoires. (…)
                                                             L’unité du cyborg est monstrueuse et illégitime ;
                                                             dans notre réalité politique actuelle, nous
                                                             ne pourrions rêver d’un mythe plus puissant
                                                             au service de notre résistance et de notre
                                                             réunification.” Donna Haraway, 1985




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Quelle différence
                                  avec la promesse d’origine ?
Il ne suffit pas de rendre les technologies plus simples et plus “naturelles”. La technologie est un moyen de
nous transformer nous-mêmes, ainsi que notre environnement. Les humains ont ­ oujours créé des artefacts
                                                                                      t
non-humains : en cela, la technologie est humaine, la question devenant de savoir si ceux qui la créent ou
qui l’appliquent le font au service de valeurs humaines.



                      La promesse reconnaît la tension                Elle considère la technologie comme  
           créative entre empowerment (capacitation,                une création culturelle, façonnée par les valeurs  
      qui suppose un certain degré de compréhension                 de chaque société tout en contribuant à faire  
         et de contrôle de la technologie) et simplicité            évoluer ces valeurs. Les cultures sont diverses,  
           (qui rend la technologie et ses applications             et la technologie devrait permettre à cette diversité  
                                      plus accessibles).            de s’exprimer pleinement.
                Elle reconnaît le fait que la technologie             Désormais incorporées dans nos objets  
      est aussi une affaire de pouvoir, et que son but              et nos espaces, les technologies numériques inter­
 devrait consister à distribuer ce pouvoir, à permettre             agiront toujours plus profondément avec nos sens  
         aux individus de discuter de ses applications,             et nos esprits. Cette évolution peut s’avérer positive  
           plutôt qu’à rendre les pouvoirs (politiques              si elle permet à chacun d’en faire usage à ses propres
                         et économiques) plus opaques.              fins. Il faut alors éviter que la technologie ne se 
                       Elle valorise l’ouverture des fins           dissimule, ne cherche à devenir plus “magique”  
        et des connaissances : produit de la créativité             et mystérieuse. Au contraire, elle doit permettre  
       humaine, la technologie doit à son tour nourrir              à tous de décoder leur propre monde et d’organiser
                cette créativité. Elle doit rester visible,         leur propre relation au monde.
                    compréhensible, ouverte au débat 
                                   comme au bricolage.




                                                          R D' H U I
                                                     OU              
                       réaliser
                                              HIER AUJ



                                                                        DE
                                                                          MAIN AP




                   la promesse                                                      quelques pistes…
   Des décisions à prendre                                                         Des grands défis
                                                 IN




                                                                      RE
                                                      S-DEMA
 	 Réorienter une part significative des pro­                                  Le projet “Je Décide”  : au travers d’une
grammes de soutien à la R&D vers des techno­                                  combinaison de technologie, d’auto-régula-
logies, des appareils, des applications qui proposent                 tion et de réglemen­ ation, fournir aux utilisateurs
                                                                                              t
plusieurs niveaux d’interaction : de l’utili­­
                                            sateur comme            des choix effectifs, informés et permanents, en parti-
consommateur (technologie “ambiante”) à l’utilisa-                  culier en ce qui concerne leurs droits. Le consentement
teur comme coproducteur (technologie ­ hackable”).
                                           “                        préalable doit être la règle générale. L’utilisateur ne
 	 Investir dans l’anthropologie, l’ethnographie, la                doit jamais ­ bandonner ses droits sans retour pos-
                                                                                    a
socio­ ogie des liens entre humains, société et techno-
     l                                                              sible. Il doit dispo­ er du droit d’obtenir et d’utiliser les
                                                                                        s
logie.                                                              d
                                                                    ­ onnées personnelles dont les systèmes disposent sur
                                                                    lui. Les organisations doivent être tenues pour respon-
   Des barrières à franchir                                         sables des conditions d’utilisation qu’elles imposent
 	 Des interfaces bidirectionnelles faisant appel aux 5             aux individus, même si ceux-ci sont censés les avoir
sens.                                                               acceptées…

 	 Une reconnaissance et une traduction du langage                  “La technologie, latin du XXIe siècle”  :
naturel automatique et en temps réel.                               a
                                                                    ­ pprendre à tous les enfants (et si possible, aux adultes)
                                                                    comment la technologie numérique fonctionne, ce
                                                                    qu’elle fait, d’où elle vient, comment la manipuler et la
                                                                    programmer, quels sont ses bénéfices et ses risques…
                                                                    “Les nouvelles lois de la robotique”   : sur
                                                                    le modèle des “Lois de la robotique” d’Isaac Asimov,
                                                                    i
                                                                    ­ maginer et mettre en discussion un ensemble simple
                                                                    de “lois” que les techno­ ogies “convergentes” de l’avenir
                                                                                            l
                                                                    devraient respecter.




                                                               15
R D' H U I
                                                      OU              




                                               HIER AUJ



                                                                        DE
                                     hier,                                          une promesse




                                                                          MAIN AP
                                                  IN
                                                                      RE
                                                      S-DEMA




                  Après vingt siècles au cours desquels                 Chrometa vous fait cadeau du temps !
              nous avons surtout cherché à [repousser]              Il est complètement automatique et vous n’avez
     les frontières de l’espace, ce sont celles du temps            plus rien à faire pour garder la trace
             que nous chercherons à franchir. L’homme               de la manière dont vous comptabilisez
          du XXIe siècle fera tout ce qu’il désire depuis           votre temps de travail.” Publicité
           l’endroit de son choix et au moment qui lui
               convient le mieux. La conquête de la vie
         ne se fera plus en réduisant les distances par                Le rythme de la vie moderne est rapide
          accélération du temps mais en les effaçant.”              et il s’accélèrera encore. Auparavant,
                   Christian Loviton, La vie à distance,            nous avions moins de choix et plus de temps
                                           Belfond, 1989            pour les faire. Aujourd’hui, nous avons besoin
                                                                    de toute l’assistance possible pour rendre
                                                                    nos choix plus aisés et rapides, et la technologie
                                                                    numérique nous y aide. (...) Ces nouvelles
                                                                    technologies nous font aussi gagner du temps
                                                                    en nous permettant de faire tant de choses
                                                                    sans quitter notre domicile.” Simone Zhang,
                                                                    Euro RSCG Shanghai


                                                                       L’expérience majeure de la modernité
      Publicité de 1980 [source                                     est celle de l’accélération. “ Hartmut Rosa,
http://www.flickr.com/photos/
jbcurio/3367196078/sizes/o/in/                                      Accélération – Une critique sociale du temps,
                 photostream/                                       2005  (trad. La Découverte, 2010)

                                                           R D' H U I
                                                      OU              
                                               HIER AUJ



                                                                       DE




                              à l’heure                                             du bilan
                                                                         MAIN AP




   Le numérique devait nous rendre plus                                        brouillent entre heures de pointe et creuses,
                                                  IN




                                                                      RE
   productifs, plus réactifs et globalement,          S-DEMA                  jour et nuit, ­ maine et week-end… Sans
                                                                                             se­
   nous faire gagner du temps. Certes, nous                                 compter que la technologie elle-même dévore
   accomplis­ ons plus de choses, plus vite  ; mais
              s                                                         du temps consacré à choisir, installer, apprendre,
   nous nous sentons toujours plus pris par le temps.               protéger, réparer, mettre à jour, interconnecter nos
   Parce qu’à mesure que nous accélérons, tout s’accélère           appareils et logiciels.
   autour de nous. Les cycles de décision, d’inno­ ation,
                                                  v                 L’aspiration, parfois velléitaire, au “slow”, exprime le
   de vie des produits, se raccourcissent. L’horizon de             fait que notre relation au temps n’est pas meilleure
   décision des entreprises comme des acteurs publics               aujourd’hui qu’hier. Pour certains, surtout les plus
   se rapproche sans cesse. Notre impatience devant                 inté­ rés, le temps manque. Mais d’autres en ont trop et
                                                                         g
   toute forme d’attente n’a d’égale que l’impatience des           ne savent qu’en faire. D’autres encore font l’expérience
   autres vis-à-vis de nous.                                        de la “taylorisation” de nouvelles activités : la relation
   Le numérique devait nous permettre, à la fois, d’orga­           client dans les centres d’appel, les tournées minutées
   niser plus librement notre temps et de mieux l’occuper.          des commerciaux, techniciens de maintenance et
   Pourtant, nous avons souvent le sentiment de ne rien             aides-soignantes... Le temps est aussi mal distribué, et
   maîtriser : ni l’afflux de messages et de sollicitations,        aussi inégalement liquide, que le capital.
   ni la séparation des temps profes­ ionnel et personnel,
                                      s                             En définitive, nous sommes parvenus à accélérer nos
   ni l’organisation de nos journées. L’individualisation           rythmes et pouvons parfois y trouver du plaisir, mais
   de nos modes de vie, les ­ ransformations économiques,
                             t                                      nous ne sommes pas parvenus à maîtriser le temps.
   ont désynchronisé nos rythmes  ; les ­   différences se

                                                               16
Ce qui a marché…                 Ce qui n'a pas marché…
               La disponibilité d’une information                 Dictature de l’urgence, impossibilité  
             et de services pertinents et efficaces             de hiérarchiser, réduction du temps  
 pour s’informer, faire des choix, agir à distance…             de réflexion, de projection.
          L’usage massif du mobile, notamment                     Hyperconnectivité, sollicitation permanente  
         à des fins de synchronisation continue,                et surcharge cognitive.
et désormais d’accès à l’internet et à des services.
                                                                  L’organisation collective des temps au sein  
                   La synchronisation des activités             de territoires : chaque acteur, chaque activité
        productives à l’échelle locale et mondiale :            s’organise sans vraiment tenir compte des autres.
             flux tendus, logistique de précision…
                                                                 La technologie reste complexe, fragile,  
                           Les agendas numériques.              mouvante, et consomme du temps.
                    L’amélioration, la diversification, 
l’interpénétration des moyens de communication
      à distance : mail, réseaux sociaux, microblog,
   messagerie instantanée, visiocommunications…
                      La densification du temps : 
          en pouvant cumuler plusieurs activités, 
        en pouvant tout faire où que nous soyons, 
          nous pouvons accomplir plus de choses 
                                  en une journée.




                        Ce qui nous a surpris…                  Ce que nous avons appris…
        Les nouvelles formes de gestion de temps,                 Le temps total d’une communauté humaine  
  notamment dans certains “systèmes d’échange                   est abondant, mais il est mal réparti et mal
     locaux” où le temps est la base de l’échange.              coordonné. Cette inégalité de répartition reflète,  
         Le mouvement “slow”, d’abord individuel,               en inversé, les inégalités sociales : les “exclus”  
           mais qui s’étend aujourd’hui à l’échelle             ont à la fois moins de revenus, moins de contacts,
                              de villes (Cittaslow).            moins de mobilité… et beaucoup, souvent  
                                                                trop de temps.
      Le développement rapide de lieux hybrides, 
        partagés, “tiers” : espaces de “coworking”,               16 % des actifs occupés travaillent au moins  
         télécentres, cafés remplissant également               de temps en temps la nuit, la moitié le samedi,  
 d’autres fonctions, épiceries-centres de livraison,            un quart le dimanche, en forte augmentation  
                        maisons de service public…              depuis les années 1990 (Insee).
                                                                  Les technologies numériques participent  
                                                                à la fois à l’accélération générale, à la confusion  
                                                                des temps, à l’individualisation des rythmes,  
                                                                et à la resynchronisation et l’organisation  
                                                                des temps. Elles aident à remplir les temps  
                                                                morts ou intersticiels.




                                                       RD'HU
                                                  OU                I
                                                 J



                                                                    D
                                          HIER AU




                                                                      EMAIN AP




                        demain,                                                  ce qui va changer
                                             IN




                                                 RE
                                                   S-DEMA
                            Technologie                                  économie  société
                  Informatique omniprésente,                          Réduction de l’ancrage spatial et temporel  
         “cloud” : on n’est plus jamais déconnecté.             des activités : dématéria­ isation, téléréunions,  
                                                                                         l
 “Informatique contemplative” : des technologies,               travail mobile et télécentres, espaces “flexibles”...
                des outils, des méthodes conçues                  Augmentation de la contrainte spatiale  
        pour nous aider à maîtriser nos rythmes.                de l’éco­ omie : économies d’énergie, “relocalisation”.
                                                                        n
                       “ Augmentation humaine” :                  Allongement de la durée de la vie et – après  
        des technologies (numériques, mais aussi                une longue période de réduction –, allongement  
        biologiques) pour penser et agir plus vite.             des temps de travail, sur l’année et sur toute la vie.
                                                                  Flexibilité du travail : horaires et statuts variables,
                                                                contrats plus précaires, carrières non-linéaires,  
                                                                forma­ ion “tout au long de la vie”...
                                                                       t



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R D' H U I
                                                 OU              




                                          HIER AUJ



                                                                DE
         quelle promesse                                                    pour demain




                                                                  MAIN AP
                                             IN
                                                               RE
                                                 S-DEMA




Après avoir contribué à l’accélération générale, le numérique devient l’outil de la maîtrise du temps,  
dans une logique de développement durable : répondre aux besoins de tous, en tenant compte de  
la limitation de nos ressources et en pensant aux générations futures. Le temps devient une forme  
de “ressource naturelle” dont on se préoccupe à titre individuel et collectif à la fois. Il s’échange, se donne
et se partage : chacun retrouve le choix permanent d’accélérer ou de ralentir, d’agir tout de suite ou plus
tard, de se coordonner ou se désynchroniser. Il s’investit : le temps long retrouve de la valeur face au temps
court. Il se cultive : sa qualité a une valeur et ce qui la dégrade, par exemple l’excès de sollicitations,  
a un prix. Il se régule et se gère comme une ressource commune et limitée : ceux qui manquent de temps
doivent en retrouver sans le reperdre immédiatement, ceux qui en ont en surplus doivent pouvoir  
l’employer d’une manière utile, valorisante et ­ econnue – ou bien choisir d’en jouir sans empiéter sur  
                                                   r
le temps des autres.




                                La promesse à l’œuvre
                  Cette appropriation individuelle              Les technologies de l’information
    du temps est la plus grande liberté que nous             promettent de nous rendre plus intelligents
    ayons gagnée, même si c’est aussi une lourde             et plus efficaces, mais elles tendent souvent
responsabilité, aussi bien pour son organisation,            à nous solliciter sans cesse et à distraire
  ses usages, que du compte final de ce que nous             notre attention. L’informatique contemplative
       en aurions fait. Mais si ce temps est à moi,          nous aide à les utiliser pour être plus concentrés
        tout usage que j’en fais doit avoir gagner           et plus créatifs. Elle est une pratique,
  sa légitimité à mes propres yeux et la regagner            pas un service à utiliser ou un produit
     sans cesse.” Jean Viard, Éloge de la mobilité.          à consommer. Elle passe par une compréhension
       Essai sur le capital temps libre et la valeur         plus profonde de la manière dont l’esprit
                        travail, Ed. de l’Aube, 2006         et les technologies travaillent ensemble.”
                                                             Alex Pang, 2011

            Nous vivons aujourd’hui sous le joug
    d’un temps standardisé, un temps industriel
     qui s’impose à nous quoi que nous fassions,                Les questions de temps ne peuvent
       où que nous soyons. (…) Il n’est que temps            plus se limiter aux problèmes d’aménagement
   de nous déprendre de l’obsession de la vitesse            du temps de travail. Elles doivent être examinées
            et de partir à la reconquête du temps            et mesurées dans toutes leurs dimensions
             et donc de nos vies.” Serge Latouche            en fonction d’un véritable projet de “maîtrise
 et Dider Harpagès, Le temps de la décroissance,             des temps” pour les individus, les organisations
                          Troisième Culture, 2010            et les territoires, à différentes échelles,
                                                             de nos appartements aux continents.”
                                                             Luc Gwiazdzinski, Temps et territoires :
                                                             les pistes de l’hyperchronie, Datar, 2012




                                                        18
Quelle différence
                                   avec la promesse d’origine ?
                        La promesse part du constat que                Il s’agit alors de considérer le temps comme  
     les problèmes rencontrés autour de l’accélération               une sorte de ressource naturelle, certes renouvelable,
ont beaucoup à voir avec ceux que l’on rencontre dans                mais dont la production est par essence limitée.
                le “développement durable” : le constat              L’objectif est d’abord d’en optimiser l’allocation,  
    qu’une ressource qu’on croyait infinie ne l’est pas ;            à la fois entre les acteurs (division du travail, valori-
 qu’une exploitation toujours plus intensive ne suffit               sation économique...) et dans le temps (actualisation,
   pas à résoudre le problème, parce qu’elle provoque                taux d'utilisation des espaces, des équipements).  
       toutes sortes d’“effets rebonds”  ; que l’inégalité           Il est aussi d’en réguler l’usage collectif, par exemple
              de distribution de la ressource fait partie            en donnant un prix aux pollutions (externalités)  
       intégrante du problème ; que sa gestion est une               ou en organisant les différents temps d'un territoire.
              affaire collective autant qu’individuelle...             Dans l’esprit du développement durable, l’approche
                                                                     économique se met au service du “développement
                                                                     humain”. Elle reconnaît alors l’importance  
                                                                     de la qualité et de l’expérience du temps, ainsi que  
                                                                     le besoin d'une gestion collective du temps  
                                                                     qui permette aux individus de se “retrouver”.




                                                            R D' H U I
                                                       OU              
                        réaliser
                                                HIER AUJ



                                                                         DE
                                                                           MAIN AP




                    la promesse                                                      quelques pistes…
   Donner une valeur au temps                                                         Une politique du temps
                                                  IN




                                                                       RE
Et si le temps devenait une unité de valeur            S-DEMA                    Et si l’on imaginait un “droit au temps”, à la
à part entière ? On pourrait acheter, offrir,                                 fois dans l’entreprise et en général ? Il pourrait
partager du temps. Des “bourses de temps” éten-                           inclure le “capital-temps” personnel, mais aussi des
draient à beaucoup plus grande échelle le principe                   temps protégés de déconnexion ou d’indis­ onibilité,
                                                                                                                     p
de certains Systèmes d’échange locaux dans lesquels                  un droit opposable à la formation tout au long de la vie
une heure de cours de maths vaut (par exemple) une                   (flexi-sécurité), le droit à des temps sabba­ iques…
                                                                                                                 t
heure de plomberie. On mesurerait les “externalités                  Et si l’on inventait un “chrono-­ rbanisme”, qui viserait
                                                                                                     u
temporelles” des produits (le temps moyen qu’il faut                 à coordonner les temps et les rythmes au même titre
passer à les apprendre, les maintenir, voire à les utili-            que l’on gère la diversité des formes de mobilité ? Cela
ser) et leur affichage deviendrait obligatoire. Et pour-             pourrait devenir l’un des nouveaux métiers des acteurs
quoi pas un principe “pollueur-payeur”, par exemple                  publics.
pour l’envoi de mails publicitaires ?
                                                                     Et si l’on choisissait de réinventer quelques moments
   Un “capital-temps” à tiroirs                                      réel­ ement collectifs, communs à tous les membres
                                                                         l
                                                                     d’une commu­ auté désireuse de se vivre comme telle
                                                                                    n
Et si chaque individu naissait avec un “capital-temps”,
                                                                     (un pays, une grande ville, l’Europe ?). Réinventer des
égal pour tous – que l’on pourrait, dans une certaine
                                                                     rituels, des ponctuations fortes de l’année ?
mesure, exploiter, faire fructifier ou simplement
consommer ? Ce capital pourrait se composer de diffé-                   Une culture du temps
rents “tiroirs”, formation, activités collectives, culture...
                                                                     Et si l’on enseignait le temps, les manières de l’orga-
ainsi qu’un tiroir “vierge”, sur lequel la société consi-
                                                                     niser et de le synchroniser, d’en négocier la gestion
dère qu’elle n’a aucun compte à demander. Chacun
                                                                     personnelle et collective, de l’employer ou non, de dif-
dispo­ erait d’une latitude pour réallouer du temps
       s
                                                                     férencier temps court et temps long ?
entre chaque tiroir, ainsi qu’entre différentes périodes
de sa vie. On pourrait augmenter son capital, par
exemple en menant des actions d’intérêt collectif, ou
en réduire le rythme de consommation, par exemple
en ­ onnant et recevant de la formation. En revanche,
    d
on ne pourrait ni acheter, ni vendre ce capital.



                                                                19
R D' H U I
                                                 OU              




                                          HIER AUJ



                                                               DE
                                hier,                                      une promesse




                                                                 MAIN AP
                                            IN
                                                              RE
                                                 S-DEMA




               La dématérialisation touche toutes
         sortes de produits. La banque se réduit à
    déplacer quelques électrons sur un téléphone
         mobile, comme c’est le cas des cartes, des
     encyclopédies et des appareils photos, livres,
       jeux de cartes, chansons, des disques et des
   lettres – dont aucun n’a plus besoin d’occuper
           un quelconque espace physique. (…) La
dématérialisation du futur inclura la production
  de viande synthétique, produite en laboratoire
     sans cerveau, ni jambes, ni entrailles.” Matt
                   Ridley, Wall Street Journal, 2012


       Dématérialiser c’est l’occasion de nettoyer
  toutes les tâches parasites qui n’apportent pas
 de valeur ajoutée (…) On met le client au centre
    et derrière on se facilite la vie.” Patrick Fèvre,
                                           SNCF, 2011


          Si les consommateurs dématérialisent
        leur usage des objets et si les techniciens
         produisent ces objets à moindre impact
    environnemental, la population peut croître
   en nombre et en richesse sans que son impact
        environnemental croisse en proportion.”
       Jesse H. Ausubel, Paul E. Waggoner, 2008




                                                                             Source : Cato Institute

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R D' H U I
                                                     OU              




                                              HIER AUJ



                                                                      DE
                          à l’heure                                               du bilan




                                                                        MAIN AP
                                                                           ­
La dématérialisation est entrée dans nos                                        Comment offrir de l’immatériel ? Comment




                                                IN
                                                                     RE
vies quotidiennes. Elle nous simplifie la vie        S-DEMA                    ne pas vivre la dématérialisation comme
dans de nombreux domaines, à commencer                                       une dépossession, quand nos acquisitions ne
par les paiements et opérations bancaires, les                          sont que des achats de droits provisoires ? À ces
démarches administratives, les transports et le tou-               inquiétudes s’ajoute la faible confiance que l’on peut
risme. Elle nous permet de ­    voyager léger grâce au             accorder aux plateformes à qui sont confiées nos biens
cloud. Elle facilite la consultation d’annonces, le par-           immatériels et qui exploitent à notre insu nos traces
tage de photos, dont nous avons de moins en moins                  d’usage. Enfin, nombreux sont ceux pour qui la déma-
de traces papier ; et des biens culturels aussi courants           térialisation est synonyme de dé­ humanisation, voire
                                                                                                     s
que les livres, disques et journaux sont de plus en plus           d’exclusion.
“immatériels”. Nous y gagnons du temps, de la liberté
d’action et de mobilité, du lien social aussi. Les biens           La promesse environnementale, également, fait fi-
communs et les pratiques de partage se développent.                gure de leurre  : les réseaux et les serveurs sont gros
                                                                   conso­ mateurs d’énergie  ; les usagers finissent par
                                                                          m
Mais de nombreux nuages viennent assombrir ce pay-                 imprimer à leurs frais ce que leurs fournisseurs ont
sage. Chacun a l’expérience de perte de ­ onnées, de
                                              d                    dématérialisé ; il n’y a pas de commerce en ligne sans
photos ou de films importants. Nul ne sait vraiment                camions et chaîne logistique. La substitution atten-
conserver sur le temps long ses documents adminis-                 due n’a pas eu lieu. L’hybridation prévaut la plupart
tratifs numériques  : l’obsolescence des ­    formats, les         du temps  : la dématérialisation permet la rematé-
bugs et les accidents informatiques nous guettent. La              rialisation, et c’est souvent une bonne ­ ouvelle pour
                                                                                                             n
vie numérique devient synonyme d’un certain désar-                 l’usager. Les conditions de maîtrise et d’appropriation
roi par l’impossible ­ estion des versions de documents,
                      g                                            déterminent l’avenir d’une déma­ érialisation heu-
                                                                                                        t
de l’infobésité, des plateformes multiples. Le gain                reuse.
fonctionnel peut ­ ’accompagner d’une perte symbo-
                    s
lique : quelles archives laisseront les écrivains demain ? 




                                   Ce qui a marché…                Ce qui n'a pas marché…
                        Banque en ligne, feuilles de paie 
                                                                    Une accélération du temps difficile à vivre.
                               et factures numériques.
          Une plus grande accessibilité à l’information              Apparition de nouvelles fractures cognitives
                   par une démocratisation des outils,             (abstraction).
           une baisse du coût d’accès, créant en retour             Pouvoir et opacité des algorithmes.
                                        de l’abondance.
                                                                     L’obsolescence des formats, des équipements,  
                    La dématérialisation de la monnaie.            la fragilité persistante des systèmes complexes  
                    Des services publics plus efficients           (crash, bug).
            (mais des dysfonctionnements plus lourds                 Les problèmes de mémoire sur le long terme :
                                    de conséquences).              archivage défectueux, standards changeants.
                 Concentration de dizaines d’appareils               La dépossession progressive : passage  
               en un seul smartphone : appareil photo,             de la propriété au droit d’usage.
                  baladeur, magnétophone, boussole…
                                                                    La captation de valeur : le client est le produit.
              Projet Gutenberg, numérisation bénévole 
                                                                    Le cartable numérique.
                          des livres en domaine public.
                                                                    Dématérialisation = déshumanisation.
                 Dématérialisation = fin de la rareté = 
            émergence de biens communs : wikipédia, 
                       logiciels, contenus et services 
                                   sous licences libres.




                                                              21
Ce qui nous a surpris…                Ce que nous avons appris…
                 La vitesse des transformations.            À créer des biens communs différents  
                     L’ubiquité des technologies          des biens publics.
         et la mobilité des activités qui va avec.          Le monde matériel est toujours là :  
    Une nouvelle gestion du domicile connecté.            il s’est hybridé avec les univers virtuels.

                L’ouverture relativement rapide             Ce qui n’est pas dématérialisé peut avoir  
                        des données publiques.            une valeur renforcée.

                   Dématérialisation = partage.             Dématérialisation = dépossession  
                                                          et captation de la valeur par des grandes  
                                                          plateformes mondiales.



                                                RD'HU
                                           OU                 I
                                           J



                                                              D
                                    HIER AU




                                                                EMAIN AP

                   demain,                                                 ce qui va changer
                                       IN




                                           RE
                                             S-DEMA

                    Poursuite des impacts                 Technologie
                   de la déma­ érialisation
                             t                              Terminaux à tout faire et “intelligence  
   La dématérialisation appliquée à l’éducation           am­ iante” avec des objets “intelligents” plutôt  
                                                              b
     et la formation : les amphis vont continuer          spécialisés.
                                     à se vider…
                                                            “Cloudification” de l’économie et des services  
 Allongement de la durée de la vie et problème            en même temps qu’une augmentation des capacités
     d
     ­ ’archivage de la “longue vie numérique”.           de stockage disponibles dans chaque appareil,  
                                                          sur chaque personne.
      Déploiement massif de nouveaux espaces 
          et ­ ouvelles organisations de travail.
             n                                              Réseaux omniprésents et remise en question  
                                                          de leur neutralité.
 Basculement croissant de la propriété à l’accès.
                                                           Des données entre ouverture et opacité.
                 E-administration de proximité.
                                                            La rematérialisation via les imprimantes 3D,  
                                                          l’impression à la demande, l’encre électronique…

                                                          Le retour de la rareté matérielle
                                                           Tension croissante sur les matières premières :  
                                                          minerais, eau, énergie.
                                                           Pénurie des composants informatiques.




                                                     22
Questions Numériques 2013/ 2014 : les promesses du numérique
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Questions Numériques 2013/ 2014 : les promesses du numérique

  • 1. RD'HUI OU   HIER AUJ DE MAIN AP IN RE S-DEMA 2013/2014
  • 3. Questions numériques  Un cycle annuel de prospective créative Quelles sont les émergences puissantes, les opportunités transformatri­ es, c les questions difficiles, les ruptures et les basculements qui vont marquer les prochaines années ? Ces questions sont essentielles pour anticiper plutôt que réagir. Chacun d’entre nous se les pose régulièrement, à sa manière, dans son activité. Mais trop souvent, sans y passer le temps nécessaire, sans les partager suffisamment, sans tirer parti des idées des autres. C’est pourquoi la Fing propose une démarche collective, annuelle, qui s’instal­ e durablement dans le calendrier : convier décideurs, chercheurs l et innovateurs à identifier ensemble les “questions numériques” des années à venir – et imaginer les manières d’y répondre. En bref, prendre le temps d’anticiper.  Une publication, un outil, un processus Questions Numériques est à la fois :  Un rendez-vous annuel : la publication du “Cahier d’enjeux”   et la mani­ estation publique associée. f  Un outil au service de la réflexion stratégique : le Cahier d’enjeux fournit la matière prospective de dossiers dans les médias, d’interventions publiques, de séminaires au sein de grandes organisations…  Un processus continu de coproduction, qui implique plusieurs   centaines d'acteurs issus de tous les horizons : directions de l’inno­ ation   v de grands groupes, acteurs publics nationaux et territoriaux, pôles de   compétitivité, chercheurs, entrepreneurs, designers, têtes de réseaux,   journalistes…  Questions Numériques Sur le web www.fing.org/questionsnumeriques
  • 4. Crédits  Coordination Daniel Kaplan  Véronique Routin  Jacques-François Marchandise    Margaux Pasquet  Renaud Francou.  Accompagnement méthodologique Nod-A  Animation de la production collaborative et Rédaction Marine Albarede  Amandine Brugière  Loup Cellard   Jean-Michel Cornu  Fabien Eychenne  Renaud Francou   Fabienne Guibé  Hubert Guillaud  Daniel Kaplan   Aurialie Jublin  Carole Leclerc  Lucie Le Moine  Amadou Lo   Jacques-François Marchandise  Thierry Marcou  Juliette Maroni   Françoise Massit-Folléa  Charles Népote  Philippe Nikolov   Pierre Orsatelli  Denis Pansu  Margaux Pasquet  Valérie Peugeot   Véronique Routin  Rémi Sussan  Thomas Thibault   les élèves de l’École Boulle.  Accueil des Ateliers Frank Kresin et l’équipe de la Waag Society (Amsterdam)    PICNIC (Amsterdam)  L’École Boulle  Vaiana Le Coustumer   et Vincent Rossin  Pôle Média de la Belle de Mai  Cap Digital  Conception Graphique Isabelle Jovanovic  Illustrations Merci aux élèves de l'école Boulle  Photos Tous droits réservés  Fabrication NH Impression Fondation Internet Nouvelle Génération www.fing.org - www.internetactu.net  8, passage Brulon  75012 Paris  (+) 33 1 83 62 98 28  infos@fing.org  CMCI  2, rue Henri Barbusse  13001 Marseille  (+) 33 4 91 52 88 08
  • 5. Sommaire  Introduction     L'œuvre des promesses ? 4 8 “ Une expérience plus humaine des technologies ” 10 “ Un meilleur usage du temps ” 14 “ La dématérialisation heureuse ” 18 “ Un monde plus sûr grâce à l'internet ” 24 26 “ Tous auteurs, créateurs, innovateurs, producteurs ” 28 “ Une intelligence collective ” 34 “ La fabrication numérique personnelle ” 38 “ Une innovation ascendante, collaborative, ouverte ” 42 44 “ Une mobilité plus libre, plus diverse, plus riche, plus durable ” 46 “ Le numérique au service d'une croissance plus verte et plus durable ” 52 “ Une planète plus smart ” 58 “ Un meilleur commerce, plus transparent, plus confiant, plus fluide ” 60 62 “ Un corps plus beau, plus fort, plus sain… et pour moins cher ” 64 “ Une identité numérique sûre, unifiée, protectrice ” 70 “ Le numérique, un nouvel Eden pour les relations humaines ” 72 “ Bien vieillir grâce au numérique ” 74 76 “ Apprendre tout le temps, tout ce que l'on veut, n'importe où ” 78 “ Des jeux pour nous transformer et transformer le monde ” 84 “ Une démocratie retrouvée, augmentée, étendue ” 88 “ Le numérique, un atout au service du développement ” 90 “ L’ascenseur social numérique ” 92  internet actu     Pourquoi ne savons-nous pas résoudre les grands problèmes ? 94  La Fing     un think tank de référence 96
  • 6. Depuis qu’il se propose au monde comme support de la “troisième révolution industrielle”, le monde du numérique n’est pas avare de promesses. À un moment ou à un autre, ses gourous, ses industriels, les institutions, ont annoncé la fin des crises et celle du travail, la paix sociale et mondiale grâce au miracle de l’échange et de la compréhension réciproque entre les hommes, une démocratie revitalisée, l’accès des pays les moins avancés au développement, l’avénement d’une conscience mondiale face aux défis environnementaux… … Mais avant de lever les yeux au ciel devant tant de naïveté, demandons-nous d’où viennent ces promesses, qui les entend, ce qu’elles produisent – et admettons que, ce faisant, nous nous tendons aussi à nous-même un miroir.  Faire des promesses, les entendre Les laboratoires de recherche, les pôles de compé­ ti­ ivité, mais aussi les communautés de dévelop­ t Les travaux de prospective technologique décrivent peurs, hackers et autres makers, produisent des volontiers l’avenir comme le produit de l’avance- paris osés en même temps qu’ils s’attellent à les ment mécanique des technologies, appliqué à des relever. Parce que leur ambition dépasse la plupart contraintes ou des défis extérieurs à toute volonté du temps le seul exploit technique, ces défis lancés (écologiques, économiques, démographiques…). à soi-même nourrissent à leur tour les promesses Ils peinent à rendre compte des formes diverses, de l’industrie et du politique. changeantes et généralement imprévues d’appro- priation de ces technologies par leurs utilisateurs. Ils pensent automatisation, optimisation, perfor-  L’empreinte de nos désirs et de nos rêves mance, plutôt que transformation. Si ces promesses se contentaient d’enluminer les L’approche par les “promesses” s’intéresse, presque d ­ iscours de l’offre, elles ne mériteraient pas d’atten­ par nature, aux transformations. Une promesse tion particulière. Mais l’innovation internet est imagine un changement profond et positif des multipolaire et distribuée, les transformations systèmes auxquels elle s’applique. Elle permet numériques touchent presque tous les domaines de débusquer, dans le passé comme dans l’ave- de l’activité humaine, les frontières entre offre et nir, ­ ’esprit et le désir humains. Elle est formulée l demande s’y brouillent. Il paraît dès lors délicat de et portée par quelqu’un, en direction de publics, savoir qui promet quoi à qui, aucun acteur n’ayant l ­ ’objectif consistant à mobiliser ensemble émet- seul les moyens de tenir ses promesses. teurs et récepteurs. Voilà ses forces. L’abaissement des frontières entre le haut et le bas Parties prenantes de l’offre technologique, intéres­ s’accompagne d’une plus grande porosité entre sés au succès de l’internet ou de la téléphonie ceux qui parlent et ceux qui font. Les promes­ mobile, les Etats et les territoires racontent le ses des intellectuels prophétiques ne sont pas numé­ ique levier de la croissance (durable) et de r toujours si éloignées des promesses en actes des la compétitivité, de la modernisation adminis- praticiens mutiques. Explorer ce champ, c’est faire trative et démocratique, de l’inclusion dans une la jonction entre l’emphatique et le naïf, c’est tra- “société de la connaissance” forcément meilleure. verser (pas forcément sans plaisir) des océans de De la ­ Déclaration d’indépendance du cyberes- “ storytelling et de vaporware et y croiser, aussi, des pace” (1996) aux partis pirates, les militant ont eux horizons ­ ésirables, des aspirations venues de loin, d aussi paré le numérique de caractéristiques idéo- des ­ ésirs en actes. d logiques, qu’elles soient libérales, collectives, liber- taires ou sécuritaires. Dès lors, cet objet “promesses” devient plus collec­ tif que jamais. Il porte des promesses qui nous Les grandes entreprises technologiques ont égale­ sont faites par nous-mêmes. Ici le premier “nous” ment construit leur “grand récit”, souvent relayé désigne le public, les usagers directs ou indirects, et enrichi par l’écosystème des entrepreneurs les bénéficiaires, les récipien­ aires des promesses ; d inno­ ants  : “pensez différent” (Apple), maximi- v un second “nous” désigne tous ceux qui endossent ser son potentiel (Microsoft), “une planète plus une part des intentions actives à l’oeuvre dans intelligente” (IBM)… Loin de s’adresser seulement le réseau  : intentions militantes, innovantes, aux consommateurs supposés crédules, ces récits encyclo­ édiques, militaires, servicielles, environ­ p tiennent ­ ussi lieu de message aux marchés et aux a nementales, créatives, et de toutes sortes, pour peu investisseurs, et de leviers de mobilisation pour qu’elles s’énoncent à destination de tiers. leurs équipes. Ils sont, aussi, des prises de risque. 6
  • 7. Les promesses qui “tiennent” expriment des espé­ Mais de la lecture d’ensemble de cette production rances et des rêves, des croyances et des intui­ ions t collective, quelques intuitions globales émergent peu ou prou partagées. Elles nourrissent le désir, la également. créativité et ­ ’énergie entrepreneuse ­ utant qu’elles l a en émanent. Elles inspirent des choix concrets, techniques, économiques ou politiques. Au travers  Petites et grandes ambitions d’elles, nous racontons le futur que nous pensons construire. Il faut prendre ces promesses au sérieux, Quand on part à la recherche de la manière dont même lorsqu’elles ne se réalisent pas. s ­ ’expriment les promesses numériques, en parti­ culier de la part d’institutions et d’acteurs politiques, une fracture saute aux yeux  : celle qui sépare le  Des promesses pour inventer demain niveau d’ambition des Américains et des Européens. Fortes de cette conviction, sous l’impulsion de la Pour la Commission Européenne, comme pour la Fing, plus de 300 personnes ont travaillé entre p ­ lupart de ses gouvernements, la fonction du nu- mai et octobre 2012 à identifier les “promesses mérique consiste : numériques” les plus structurantes des dernières années, puis à en tirer le bilan pour se projeter vers  à “relever les défis auxquels la société doit faire l’avenir. face, tels que le changement climatique et le vieillis­ sement de la population” (Digital Agenda, 2010), À partir d’un premier travail de défrichage mené au printemps, nous avons consolidé le matériau issu  à “faire de l’Union européenne l’économie de des ateliers et des échanges en ligne pour conver- la connaissance la plus compétitive et la plus ger autour de 21 “promesses”. Equipés alors de nos dynamique du monde d'ici à 2010, capable d’une lampes de spéléologues, nous sommes partis à la croissance économique durable accompagnée r ­ echerche des expressions de ces promesses, des d’une amélioration quantitative et qualitative de plus classiques aux plus hétérodoxes. Fin août, le l ­ ’emploi et d’une plus grande cohésion sociale ” matériau de base des ­ teliers “Questions Numé- a (Stratégie de Lisbonne, 2000). riques” était publié en ligne. Dans cette vision, le numérique constitue un En septembre et octobre 2012, trois ateliers orga­ contexte donné auquel nous devons nous adapter, nisés à Amsterdam (avec la Waag Society et la mani- qui peut par ailleurs nous aider à résoudre les pro- festation PICNIC), Marseille (avec Lift) et Paris, ont blèmes ­ ’aujourd’hui et de demain – notamment à d revisité les promesses que les participants consi- exploiter de nouveaux gisements d’efficience et de déraient comme les plus parlantes. Répartis par productivité. petits groupes, ils ont répondu à quatre questions successives : Il en va tout autrement de l’autre côté de l ­ ’Atlantique. Dès le début des années 1990, les  Quel bilan peut-on tirer de la promesse ? Qu’est- “autoroutes de l’information” promues par Al Gore ce qui a marché ou non, qu’est-ce qui nous a sur- rencontrent les procla­ ations enflammées des m pris, qu’avons-nous appris ? coauteurs de la “Magna Carta pour l’ère de la connaissance” (1994) annonçant “une extension  Qu’est-ce qui, demain, changera le contexte sans précédent de la liberté humaine.” Les auteurs même dans lequel la promesse peut se formuler de Wikinomics (2006) annoncent “un âge d’or, aussi ou se reformuler, se réaliser ? important que la Renaissance ou l’émergence de la démo­ ratie à Athènes.” Le rapport de Rocco et c  Ayant appris ce que nous avons appris, comment Bainbridge (2003) qui définit la stratégie techno­ reformulerions-nous pour demain une promesse logique de la ­ ational Science Foundation s’intitule N à la fois ambitieuse, tournée vers l’avenir et “Augmenter la performance humaine” et puise crédible ? dans des sources proches de la science-fiction et du transhumanisme. Plus tard, la Secrétaire  Enfin, toujours instruits par l’expérience, que d’Etat Hillary ­ linton défend le carac­ ère ouvert C t f ­ audrait-il faire pour tenir cette nouvelle promesse ? de l’internet au nom de ­ l’opposant qui utilise les “ médias sociaux pour ­ rganiser une manifes­ ation o t Vous tenez le résultat de ce travail entre les mains. en Egypte  ; l’étudiante qui envoie à sa famille Prenez-le comme un support de travail, d’inspi- des photos du semestre qu’elle vient de passer à ration et d’aspiration, d’action enfin. Faites-en un l’étranger  ; l’avocat vietnamien qui blogue pour outil de travail, plutôt qu’une ­ éférence intangible. r dénoncer la corruption  ; l’adolescent ­ méricain a 7
  • 8. harcelé par ses condisciples et qui trouve du p ­ ourtant, l’expérience quotidienne de la mobilité r ­ éconfort en ligne ; la petite entrepreneuse du ­ enya K a fort peu changé. Presque tous les enseignants et qui gère son compte en banque sur son mobile  ; la grande majorité des familles utilisent l’internet la philosophe chinoise qui lit des revues scien­ à des fins éducatives  ; mais rien, ou presque, n’a tifiques pour sa thèse  ; le scientifique brésilien qui changé dans les systèmes éducatifs. En ligne, nous partage ses données en temps réel avec ses collè­ devenons tous auteurs, innovateurs, producteurs, gues de l’autre bout du monde  ; et les milliards et nous savons y produire de l’intelligence collective milliards d’inter­ ctions quotidiennes en ligne au a à des échelles sans précédent ; pourtant nous nous travers desquels les gens communiquent avec ceux montrons toujours aussi incapables de répondre qu’ils aiment, suivent l’actualité, font leur travail et aux grands défis collectifs, toujours plus inquiets participent aux débats qui ­ hangeront leur monde.” c face à l’avenir… Imagine-t-on une femme politique européenne prononcer un tel discours ? Autrement dit, beaucoup de promesses sont à la fois tenues (les pratiques annoncées se sont maté- À première lecture, on pourrait en conclure que rialisées, souvent plus vite que prévu) et trahies les Américains parlent de politique quand les (les difficultés du quotidien, les injustices sociales, Européens parlent d’économie. Pourtant les défis les aberrations écono­ iques, les impasses éco- m que se lancent les Américains sont évidemment logiques, n’ont pas plus de solution aujourd’hui écono­ iques ; la vraie différence réside dans leur m qu’hier). Tout a changé, et rien n’a changé ! niveau d’ambition. Pour eux, la technologie a pour fonction de transformer  en profondeur ce à quoi Il serait trop facile de mettre cette disjonction elle s’applique, d’en changer les termes de réfé- sur le compte de l’inertie, voire de la résistance rence. Elle propose des nouvelles frontières, que des pouvoirs établis. Elles existent, bien sûr. Mais des entreprises innovantes s’en iront conquérir. tournons nos regards vers quelques marchés que Sans ­ écessairement adhérer aux discours les plus n le numérique a déjà transformés, profondément exaltés, on peut trouver dans cette ambition l’une et pour toujours, tels ceux des biens culturels des raisons de la domination constante de l’inter- et des médias. Les jeux d’acteurs et les modèles net par les géants américains, de la capacité d’ini- économiques ont effectivement changé, des nou- tiative et de renouvel­ ement de ses scientifiques l veaux acteurs ont émergé. Cela a-t-il pour autant comme de ses entrepreneurs. produit un nouvel âge d’or de la création, diffusé beaucoup plus largement la culture et la connais- sance, rendu la plupart des médias plus incisifs et  Tout change pour que rien ne change ? plus indépendants des pouvoirs économiques et politiques ? On a le droit d’en douter. Certaines promesses du numérique n’ont claire- ment pas été tenues. Le numérique contribue à Alors, que manque-t-il ? Une volonté qui dépasse la déstabiliser les dictatures, mais il n’a pas résolu technologie et qui, sans doute, en oriente pour par- la crise des démocraties. Il n’a rendu la crois- tie le développement et le déploiement. sance ni plus pérenne, ni plus écologiquement soutenable  – au contraire, il a rendu possi­ les b À elle seule, la technologie, même massivement les dérèglements des marchés financiers qui appropriée, ne suffit pas à résoudre des ­ roblèmes p ont déclen­ hé la crise que nous vivons. Il n’a pas c dont l’origine puise loin dans l’histoire ainsi que sorti les pays les moins avancés du sous-dévelop­ dans l’organisation politique et économique de pement. Ces promesses étaient-elles hors de nos sociétés. Si l’on veut un changement systé­ portée ? A-t-on mal utilisé les technologies ? Ou mique, alors il faut décrire ce changement et y sinon, que manque-t-il d’autre ? appliquer une volonté forte, tenace, largement partagée tout en acceptant la confrontation. Plus intéressant, plus troublant aussi : la disjonc- tion que l’on constate dans plusieurs domaines Nous assignons habituellement aux institutions entre, d’un côté, le développement rapide et ­ assif m p ­ olitiques la tâche de dégager et de mettre en d’outils, de services et de pratiques numériques oeuvre la volonté collective. Mais nous doutons et, de l’autre, des effets systémiques faibles, voire a ­ ujourd’hui de leur capacité à accomplir l’un nuls, voire carrément paradoxaux. Le numérique comme l’autre. D’où l’orientation qui ressort de la a libéré notre temps de multiples contraintes  ; plupart des groupes qui ont travaillé sur les pro- or nous nous sentons toujours plus pris par le messes : demander aux technologies de distribuer temps. La dématérialisation a considé­ ablement r plus largement l’information, les capacités d’action, progressé dans nos vies quotidiennes comme le pouvoir, pour faciliter l’émergence et la crois- dans les organisations, sans vraiment simplifier sance des alternatives. nos vies, ni la gestion des entreprises, ni non plus réduire la consommation de papier. Le numérique a transformé nos mobilités, l’organisation de notre temps, nos manières de communiquer… et 8
  • 9.  Le risque de la captation Voilà pourquoi les promesses ont tant d’impor- Mais cette distribution, il faut également la vouloir ! tance, pourquoi il faut en douter et les chérir à Elle n’est pas le produit mécanique de la diffusion, la fois  – et ­ ourquoi nous avons choisi d’en faire p même quasi-générale, des appareils numériques et à leur tour le matériau et le produit d’un travail des accès au réseau. collectif. La technique nous demande elle-même beaucoup, En définitive, c’est peut-être la reformulation de la et cela coûte plus aux uns qu’aux autres. Apprendre p ­ romesse associée au jeu (titre originel : “Des jeux à l’utiliser, la gérer, la sécuriser, résoudre les innom- pour nous transformer et transformer le monde”) brables petits et grands problèmes quotidiens qui exprime le mieux ce que nous devrions accom- qu’elle produit, taxe notre temps et notre attention. plir à l'aide du numérique. Le but du jeu, si l’on ose En faire un usage autonome, actif, productif, s’avère dire, ne consisterait plus à ­ ’évader de la réalité, ni s plus exigeant encore. Le temps, les moyens et les à aborder de manière ludique des sujets sérieux, compétences nécessaires sont très inégalement mais “à rendre la réalité elle-même plus joueuse.” distribués  – d’autant que, bien souvent, les plus Belle promesse… pauvres (à l’échelle locale et mondiale) paient leurs pratiques numériques plus cher, en temps comme Daniel Kaplan en argent. Le numérique distribue-t-il du ­ ouvoir “à p et Jacques-François Marchandise tous” ou bien servira-t-il d’abord à permettre à de nouvelles élites de remplacer les anciennes ? L’intervention de la “multitude” dans la production de connaissances et de créations, dans l’innovation et la création de valeur, dans la mise en discussion de toutes sortes de choses – des effets secondaires de tel médicament aux secrets diplomatiques américains –, constitue bel et bien l’une des trans- formations majeures qu’a produit le numérique. Mais cette intervention s’appuie en général sur des plates-formes, généralement privées, dont elle constitue la matière première et la richesse. Fondé sur la contribution volontaire, ou du moins consen- tie, de leurs utilisateurs, leur modèle économique repose sur la captation la plus complète et durable possible de l’attention, de l’information, du travail des individus. Au lieu de s’appliquer à des enjeux collectifs, cette formidable énergie se voit absorbée dans des sortes de trous noirs, dont elle ne ressort que sous la forme de valeur marchande  – car “si vous ne payez pas, c’est que vous êtes le produit.” Pas étonnant, du coup, que l’on retrouve autour de la plupart des promesses une attention croissante à la maîtrise des technologies et des contenus par les individus, au choix, à la montée en compétence et enfin, à l’équilibre entre contribution et “retour” ( ­ symbolique ou tangible) aux contributeurs comme à la communauté. * * * Les premières utopies du cyberespace partaient de l’idée que les contraintes physiques, mais aussi sociales et économiques, du “monde réel”, dispa­ raîtraient dans cet espace sans gravité ni frotte- ment, sans rareté ni conflit d’usage, infiniment plastique et reconfigurable. Inévitablement, la rencontre avec la réalité a déçu. Et pourtant, le numé­ ique reste encore le lieu où se racontent et r s’instancient les espérances contem­ oraines, celui p vers lequel convergent les créateurs et les innova- teurs qui ne se satisfont pas de l’état du monde. 9
  • 10. RD'HUI RD'HUI RD'HUI RD'HUI OU   OU   OU   OU   HIER AUJ DE HIER AUJ HIER AUJ HIER AUJ DE DE DE MAIN AP MAIN AP MAIN AP MAIN AP IN IN IN IN RE RE RE RE S-DEMA S-DEMA S-DEMA S-DEMA une promesse son bilan quelle promesse quelles pistes pour demain ? d'action ? .……………………………………………………………………………    ………………………………………………………………………… .…………………………………………………………………………………… .……………………………………………………………………………    ………………………………………………………………………… Une promesse non traitée .…………………………………………………………………………………… (à vous de jouer !) .……………………………………………………………………………    ………………………………………………………………………… .……………………………………………………………………………    ………………………………………………………………………… 10 11
  • 11. R D' H U I OU   HIER AUJ DE hier, une promesse MAIN AP IN RE S-DEMA Le meilleur ordinateur est un serviteur calme et invisible. (…) Les technologies les plus profondes sont celles qui disparaissent. Les hommes ont le sentiment Elles se fondent dans la trame de la vie d’avoir perdu le contact avec la réalité. quotidienne jusqu’à en devenir indiscernables” Le développement de la polysensualité, Marc Weiser, 1991 du soft touch, de l’encapsulation des odeurs, ou d’une façon plus générale, le recours à des matières qui font appel à tous nos sens, sont une réponse à cette perte de contact” Si aujourd’hui la technologie est froide, Monique Large, Dezineo, 2004 l’enjeu des années à venir est de la réchauffer de la chaleur humaine, celle qui donne sens à la vie. C’est seulement à cette condition qu’elle constituera une extension du domaine de la vie.” Didier Fass, Futur 2.0, 2007 R D' H U I OU   HIER AUJ DE à l’heure du bilan MAIN AP Les gens ont massivement adopté les tech- Les technologies numériques participent IN RE nologies numériques, souvent ­ u-delà de a S-DEMA à l’accélération constante de nos vies, à ce qu’espéraient les industriels et en avance la surcharge informationnelle, au déficit vis-à-vis des organisations. Ces technologies attentionnel, à la standardisation d’une ­ pensée “ répon­ ent visiblement à des aspirations humaines d Powerpoint”… Elles contribuent à une forme de dés- profondes en matière de communication, d’expres- humanisation de nos sociétés  : des ­ ystèmes auto- s sion, de coopération. matiques remplacent les inter­ ctions humaines a Dans de nombreux domaines, notre expérience des entre les clients et les entreprises (voire au sein des technologies s’est améliorée et enrichie. Mais elles organi­ ations) et menacent la vie privée. Leur inter­ s nous soumettent également à de lourdes contraintes. action produit ­ arfois des “ émergences ” hors de tout p Nous devons sans cesse apprendre à utiliser de nou- contrôle, comme on a pu le constater sur les marchés veaux appareils et logiciels. L’obsoles­ ence program­ c financiers. mée consomme du temps, de l’attention et de l’argent. Nous avons beaucoup appris sur la manière dont Nous sommes souvent seuls quand les technologies nous co-évoluons avec nos technologies. À l’heure où dysfonctionnent. celles-ci nous permettent d’intervenir sur nos esprits, nos corps, ainsi que sur certains des fonde­ ents de m nos sociétés, cette connaissance prend une impor- tance croissante. Il faut mieux la partager, et mieux l’utiliser en amont de la conception de nouvelles tech- nologies ou de nouvelles appli­ ations. c 12
  • 12. Ce qui a marché… Ce qui n'a pas marché…  Une adoption massive   Les robots personnels (pour l’instant),   des techno­ ogies numériques, par presque  l l’informatique “vestimentaire”… toutes les catégories sociales.  La technologie exige toujours beaucoup    Les technologies numériques relient  de notre temps, de notre attention et de notre argent. les hommes, facilitent leur communication  Nous acceptons souvent des machines   et leur collaboration, servent  ce que nous n’accepterions jamais d’un humain,   de véhicules à leur expression et leur créativité. et avons tendance à assumer la responsabilité    Elles ont donné naissance à des milliers  de leurs dysfonctionnements. de services et d’outils très utiles. Nous avons pu   Certains des pires aspects d’un développement “externaliser” auprès d’elles de nombreuses tâches, techno-centré subsistent : l’obsolescence program­ ainsi que des portions entières de notre mémoire. mée, l’indifférence aux effets environnementaux,  Les interfaces deviennent plus “naturelles”,  l’excès de richesse fonctionnelle et de complexité… fondées sur la voix, le toucher, le mouvement…  Nous sommes plus déprimés aujourd’hui   Globalement, malgré certaines exceptions, nous qu’avant de recevoir toutes ces technologies –   savons mieux qu’avant créer des applica­ ions t mais celles-ci n’en sont pas forcément   accessibles et faciles à utiliser. responsables… Ce qui nous a surpris… Ce que nous avons appris…  La lenteur de l’évolution des paradigmes   La technologie nous transforme à mesure   technologiques : l’interface “fenêtres-souris”  que nous la transformons. Elle nous force à discuter   a plus de 30 ans ! de ce qui est ou n’est pas humain, en sachant    Les technologies numériques demeurent  que la réponse évoluera dans le temps et   très sujettes aux pannes, et ceux qui les produisent selon les cultures. n’en assument pas la responsabilité.  Les interfaces ne servent pas qu’à rendre    La publicité de soi à l’aide des outils numériques, les technologies utilisables, elles définissent la nature malgré la crainte ( justifiée) d’une érosion  de ce qu’on peut faire avec et au travers d’elles.   rapide des frontières de la vie privée. Il restera difficile de trouver le bon équilibre   entre la richesse fonctionnelle, la simplicité et  Moins de temps pour réfléchir : le numérique  l’ouverture aux usages imprévus. semble tout entier tourné vers l’action !  La technologie continue d’évoluer plus    Les “technologies émotionnelles”, les robots  vite que les coutumes sociales et que   amicaux, Tamagotchi, Furby… les organisations, ce qui peut exclure certaines    Les phénomènes “émergents” sur des marchés parties de la population. entièrement automatisés, tels que   Les machines nous aident à moins prendre soin   le “flash crash” du NASDAQ en mai 2010. des autres, par exemple de nos parents vieillissants.  Les captcha : “Prouvez-moi   La technologie ne deviendra plus “humaine”   que vous êtes humain !” que si ceux qui la conçoivent, la produisent   et l’exploitent ont des buts et des comportements “humains”… RD'HU OU I J  D HIER AU EMAIN AP demain, ce qui va changer IN RE S-DEMA  Ce qui va changer économie Technologie  Appauvrissement des classes moyen­ es… et des n gouvernements   Environ­ ements et ­ ystèmes “intel- n s  Informatique ambiante, objets et espaces “intel­ ligents”  : maisons, villes, réseaux…   Dépen­ ance d ligents”, maturité des robots personnels   Big data, croissante ­vis-à-vis des techno­­ logies numériques  extraction automatique de connaissances, prévision  Extension du “Do It Yourself”   Pression en faveur temps réel, décision algorithmique   Convergence d’objets plus sobres en énergie, plus durables. “Nano-Bio-Info-Cogno”   Des interfaces “tangibles”, utilisant nos 5 sens   Améliorations de la reconnais- société sance de la parole et de la compréhension du langage  Vieillissement au Nord   Arrivée aux commandes des naturel   “Affective computing”  : les ordinateurs ap- “digital natives”   Une consommation plus définie par prennent à détecter et à communiquer des émotions  des valeurs   Des relations sociales hybrides, numé-  Bio-inspiration… riques et physiques à la fois.  …et ce qui ne changera sans doute pas  La barrière des langues, malgré les efforts en matière de traduction automatique   Notre sentiment de man- quer de temps. 13
  • 13. R D' H U I OU   HIER AUJ DE quelle promesse pour demain MAIN AP IN RE S-DEMA Les technologies numériques seront conçues afin de :  Donner plus de capacités aux humains, plutôt que de les remplacer ou de les ignorer  Aider les humains à atteindre de nouvelles frontières, personnelles ou collectives  Multiplier et enrichir les interactions et les collaborations entre humains  Élargir l’espace des possibilités futures, plutôt que de le délimiter  Montrer aux humains du respect, faire preuve d’empathie, et les aider à faire preuve de résilience quand elles tombent en panne  Rendre leur accès et leur apprentissage aisés, tout en reconnaissant la diversité des utilisateurs et   en permettant à ceux qui le désirent de comprendre leur fonctionnement, voire de les bricoler. La promesse à l’œuvre L’important n’est pas tant que Cette dimension, à la fois existentielle les machines sympathisent avec nous, et philosophique, touche à la transformation qu’elles deviennent nos amis, mais que nous de l’humain en un objet numérique, mais aussi nous sympathisions avec elles.” en un objet du numérique, c’est-à-dire Ben Bashford, 2012  en un être culturel numérique, convertible, extensible et capable de circuler de manières inédites grâce à la convergence de la technologie En acquérant le langage, les humains et du corps.”Milhad Doueihi,   n’ont pas seulement appris à écouter, mais bien Pour un humanisme numérique, 2012 à parler. En apprenant à lire, nous apprenons à écrire. Et à mesure que notre réalité devient de plus en plus numérique, nous ne devons pas Nous sommes tous des chimères, seulement apprendre à utiliser des programmes, des hybrides de machines et d’organismes mais bien à les créer.” Douglas Rushkoff, vivants ; bref, des cyborgs. Dans un monde Program or be programmed, 2010 de cyborgs, les gens pourraient vivre sans s’effrayer de leur ressemblance avec les animaux comme avec les machines, sans s’inquiéter de leurs identités toujours partielles ni de leurs points de vue contradictoires. (…) L’unité du cyborg est monstrueuse et illégitime ; dans notre réalité politique actuelle, nous ne pourrions rêver d’un mythe plus puissant au service de notre résistance et de notre réunification.” Donna Haraway, 1985 14
  • 14. Quelle différence avec la promesse d’origine ? Il ne suffit pas de rendre les technologies plus simples et plus “naturelles”. La technologie est un moyen de nous transformer nous-mêmes, ainsi que notre environnement. Les humains ont ­ oujours créé des artefacts t non-humains : en cela, la technologie est humaine, la question devenant de savoir si ceux qui la créent ou qui l’appliquent le font au service de valeurs humaines.  La promesse reconnaît la tension   Elle considère la technologie comme   créative entre empowerment (capacitation,  une création culturelle, façonnée par les valeurs   qui suppose un certain degré de compréhension  de chaque société tout en contribuant à faire   et de contrôle de la technologie) et simplicité  évoluer ces valeurs. Les cultures sont diverses,   (qui rend la technologie et ses applications  et la technologie devrait permettre à cette diversité   plus accessibles). de s’exprimer pleinement.  Elle reconnaît le fait que la technologie   Désormais incorporées dans nos objets   est aussi une affaire de pouvoir, et que son but  et nos espaces, les technologies numériques inter­ devrait consister à distribuer ce pouvoir, à permettre agiront toujours plus profondément avec nos sens   aux individus de discuter de ses applications,  et nos esprits. Cette évolution peut s’avérer positive   plutôt qu’à rendre les pouvoirs (politiques  si elle permet à chacun d’en faire usage à ses propres et économiques) plus opaques. fins. Il faut alors éviter que la technologie ne se   Elle valorise l’ouverture des fins  dissimule, ne cherche à devenir plus “magique”   et des connaissances : produit de la créativité et mystérieuse. Au contraire, elle doit permettre   humaine, la technologie doit à son tour nourrir  à tous de décoder leur propre monde et d’organiser cette créativité. Elle doit rester visible,  leur propre relation au monde. compréhensible, ouverte au débat  comme au bricolage. R D' H U I OU   réaliser HIER AUJ DE MAIN AP la promesse quelques pistes…  Des décisions à prendre  Des grands défis IN RE S-DEMA Réorienter une part significative des pro­ Le projet “Je Décide”  : au travers d’une grammes de soutien à la R&D vers des techno­ combinaison de technologie, d’auto-régula- logies, des appareils, des applications qui proposent tion et de réglemen­ ation, fournir aux utilisateurs t plusieurs niveaux d’interaction : de l’utili­­ sateur comme des choix effectifs, informés et permanents, en parti- consommateur (technologie “ambiante”) à l’utilisa- culier en ce qui concerne leurs droits. Le consentement teur comme coproducteur (technologie ­ hackable”). “ préalable doit être la règle générale. L’utilisateur ne Investir dans l’anthropologie, l’ethnographie, la doit jamais ­ bandonner ses droits sans retour pos- a socio­ ogie des liens entre humains, société et techno- l sible. Il doit dispo­ er du droit d’obtenir et d’utiliser les s logie. d ­ onnées personnelles dont les systèmes disposent sur lui. Les organisations doivent être tenues pour respon-  Des barrières à franchir sables des conditions d’utilisation qu’elles imposent Des interfaces bidirectionnelles faisant appel aux 5 aux individus, même si ceux-ci sont censés les avoir sens. acceptées… Une reconnaissance et une traduction du langage “La technologie, latin du XXIe siècle”  : naturel automatique et en temps réel. a ­ pprendre à tous les enfants (et si possible, aux adultes) comment la technologie numérique fonctionne, ce qu’elle fait, d’où elle vient, comment la manipuler et la programmer, quels sont ses bénéfices et ses risques… “Les nouvelles lois de la robotique”   : sur le modèle des “Lois de la robotique” d’Isaac Asimov, i ­ maginer et mettre en discussion un ensemble simple de “lois” que les techno­ ogies “convergentes” de l’avenir l devraient respecter. 15
  • 15. R D' H U I OU   HIER AUJ DE hier, une promesse MAIN AP IN RE S-DEMA Après vingt siècles au cours desquels Chrometa vous fait cadeau du temps ! nous avons surtout cherché à [repousser] Il est complètement automatique et vous n’avez les frontières de l’espace, ce sont celles du temps plus rien à faire pour garder la trace que nous chercherons à franchir. L’homme de la manière dont vous comptabilisez du XXIe siècle fera tout ce qu’il désire depuis votre temps de travail.” Publicité l’endroit de son choix et au moment qui lui convient le mieux. La conquête de la vie ne se fera plus en réduisant les distances par Le rythme de la vie moderne est rapide accélération du temps mais en les effaçant.” et il s’accélèrera encore. Auparavant, Christian Loviton, La vie à distance,  nous avions moins de choix et plus de temps Belfond, 1989 pour les faire. Aujourd’hui, nous avons besoin de toute l’assistance possible pour rendre nos choix plus aisés et rapides, et la technologie numérique nous y aide. (...) Ces nouvelles technologies nous font aussi gagner du temps en nous permettant de faire tant de choses sans quitter notre domicile.” Simone Zhang, Euro RSCG Shanghai L’expérience majeure de la modernité Publicité de 1980 [source est celle de l’accélération. “ Hartmut Rosa, http://www.flickr.com/photos/ jbcurio/3367196078/sizes/o/in/ Accélération – Une critique sociale du temps, photostream/ 2005 (trad. La Découverte, 2010) R D' H U I OU   HIER AUJ DE à l’heure du bilan MAIN AP Le numérique devait nous rendre plus brouillent entre heures de pointe et creuses, IN RE productifs, plus réactifs et globalement, S-DEMA jour et nuit, ­ maine et week-end… Sans se­ nous faire gagner du temps. Certes, nous compter que la technologie elle-même dévore accomplis­ ons plus de choses, plus vite  ; mais s du temps consacré à choisir, installer, apprendre, nous nous sentons toujours plus pris par le temps. protéger, réparer, mettre à jour, interconnecter nos Parce qu’à mesure que nous accélérons, tout s’accélère appareils et logiciels. autour de nous. Les cycles de décision, d’inno­ ation, v L’aspiration, parfois velléitaire, au “slow”, exprime le de vie des produits, se raccourcissent. L’horizon de fait que notre relation au temps n’est pas meilleure décision des entreprises comme des acteurs publics aujourd’hui qu’hier. Pour certains, surtout les plus se rapproche sans cesse. Notre impatience devant inté­ rés, le temps manque. Mais d’autres en ont trop et g toute forme d’attente n’a d’égale que l’impatience des ne savent qu’en faire. D’autres encore font l’expérience autres vis-à-vis de nous. de la “taylorisation” de nouvelles activités : la relation Le numérique devait nous permettre, à la fois, d’orga­ client dans les centres d’appel, les tournées minutées niser plus librement notre temps et de mieux l’occuper. des commerciaux, techniciens de maintenance et Pourtant, nous avons souvent le sentiment de ne rien aides-soignantes... Le temps est aussi mal distribué, et maîtriser : ni l’afflux de messages et de sollicitations, aussi inégalement liquide, que le capital. ni la séparation des temps profes­ ionnel et personnel, s En définitive, nous sommes parvenus à accélérer nos ni l’organisation de nos journées. L’individualisation rythmes et pouvons parfois y trouver du plaisir, mais de nos modes de vie, les ­ ransformations économiques, t nous ne sommes pas parvenus à maîtriser le temps. ont désynchronisé nos rythmes  ; les ­ différences se 16
  • 16. Ce qui a marché… Ce qui n'a pas marché…  La disponibilité d’une information   Dictature de l’urgence, impossibilité   et de services pertinents et efficaces  de hiérarchiser, réduction du temps   pour s’informer, faire des choix, agir à distance… de réflexion, de projection.  L’usage massif du mobile, notamment   Hyperconnectivité, sollicitation permanente   à des fins de synchronisation continue,  et surcharge cognitive. et désormais d’accès à l’internet et à des services.  L’organisation collective des temps au sein    La synchronisation des activités  de territoires : chaque acteur, chaque activité productives à l’échelle locale et mondiale :  s’organise sans vraiment tenir compte des autres. flux tendus, logistique de précision…  La technologie reste complexe, fragile,    Les agendas numériques. mouvante, et consomme du temps.  L’amélioration, la diversification,  l’interpénétration des moyens de communication à distance : mail, réseaux sociaux, microblog, messagerie instantanée, visiocommunications…  La densification du temps :  en pouvant cumuler plusieurs activités,  en pouvant tout faire où que nous soyons,  nous pouvons accomplir plus de choses  en une journée. Ce qui nous a surpris… Ce que nous avons appris…  Les nouvelles formes de gestion de temps,  Le temps total d’une communauté humaine   notamment dans certains “systèmes d’échange est abondant, mais il est mal réparti et mal locaux” où le temps est la base de l’échange. coordonné. Cette inégalité de répartition reflète,    Le mouvement “slow”, d’abord individuel,  en inversé, les inégalités sociales : les “exclus”   mais qui s’étend aujourd’hui à l’échelle  ont à la fois moins de revenus, moins de contacts, de villes (Cittaslow). moins de mobilité… et beaucoup, souvent   trop de temps.  Le développement rapide de lieux hybrides,  partagés, “tiers” : espaces de “coworking”,   16 % des actifs occupés travaillent au moins   télécentres, cafés remplissant également  de temps en temps la nuit, la moitié le samedi,   d’autres fonctions, épiceries-centres de livraison, un quart le dimanche, en forte augmentation   maisons de service public… depuis les années 1990 (Insee).  Les technologies numériques participent   à la fois à l’accélération générale, à la confusion   des temps, à l’individualisation des rythmes,   et à la resynchronisation et l’organisation   des temps. Elles aident à remplir les temps   morts ou intersticiels. RD'HU OU I J  D HIER AU EMAIN AP demain, ce qui va changer IN RE S-DEMA Technologie économie  société  Informatique omniprésente,   Réduction de l’ancrage spatial et temporel   “cloud” : on n’est plus jamais déconnecté. des activités : dématéria­ isation, téléréunions,   l  “Informatique contemplative” : des technologies,  travail mobile et télécentres, espaces “flexibles”... des outils, des méthodes conçues   Augmentation de la contrainte spatiale   pour nous aider à maîtriser nos rythmes. de l’éco­ omie : économies d’énergie, “relocalisation”. n  “ Augmentation humaine” :   Allongement de la durée de la vie et – après   des technologies (numériques, mais aussi  une longue période de réduction –, allongement   biologiques) pour penser et agir plus vite. des temps de travail, sur l’année et sur toute la vie.  Flexibilité du travail : horaires et statuts variables, contrats plus précaires, carrières non-linéaires,   forma­ ion “tout au long de la vie”... t 17
  • 17. R D' H U I OU   HIER AUJ DE quelle promesse pour demain MAIN AP IN RE S-DEMA Après avoir contribué à l’accélération générale, le numérique devient l’outil de la maîtrise du temps,   dans une logique de développement durable : répondre aux besoins de tous, en tenant compte de   la limitation de nos ressources et en pensant aux générations futures. Le temps devient une forme   de “ressource naturelle” dont on se préoccupe à titre individuel et collectif à la fois. Il s’échange, se donne et se partage : chacun retrouve le choix permanent d’accélérer ou de ralentir, d’agir tout de suite ou plus tard, de se coordonner ou se désynchroniser. Il s’investit : le temps long retrouve de la valeur face au temps court. Il se cultive : sa qualité a une valeur et ce qui la dégrade, par exemple l’excès de sollicitations,   a un prix. Il se régule et se gère comme une ressource commune et limitée : ceux qui manquent de temps doivent en retrouver sans le reperdre immédiatement, ceux qui en ont en surplus doivent pouvoir   l’employer d’une manière utile, valorisante et ­ econnue – ou bien choisir d’en jouir sans empiéter sur   r le temps des autres. La promesse à l’œuvre Cette appropriation individuelle Les technologies de l’information du temps est la plus grande liberté que nous promettent de nous rendre plus intelligents ayons gagnée, même si c’est aussi une lourde et plus efficaces, mais elles tendent souvent responsabilité, aussi bien pour son organisation, à nous solliciter sans cesse et à distraire ses usages, que du compte final de ce que nous notre attention. L’informatique contemplative en aurions fait. Mais si ce temps est à moi, nous aide à les utiliser pour être plus concentrés tout usage que j’en fais doit avoir gagner et plus créatifs. Elle est une pratique, sa légitimité à mes propres yeux et la regagner pas un service à utiliser ou un produit sans cesse.” Jean Viard, Éloge de la mobilité. à consommer. Elle passe par une compréhension Essai sur le capital temps libre et la valeur plus profonde de la manière dont l’esprit travail, Ed. de l’Aube, 2006  et les technologies travaillent ensemble.” Alex Pang, 2011 Nous vivons aujourd’hui sous le joug d’un temps standardisé, un temps industriel qui s’impose à nous quoi que nous fassions, Les questions de temps ne peuvent où que nous soyons. (…) Il n’est que temps plus se limiter aux problèmes d’aménagement de nous déprendre de l’obsession de la vitesse du temps de travail. Elles doivent être examinées et de partir à la reconquête du temps et mesurées dans toutes leurs dimensions et donc de nos vies.” Serge Latouche  en fonction d’un véritable projet de “maîtrise et Dider Harpagès, Le temps de la décroissance, des temps” pour les individus, les organisations Troisième Culture, 2010 et les territoires, à différentes échelles, de nos appartements aux continents.” Luc Gwiazdzinski, Temps et territoires : les pistes de l’hyperchronie, Datar, 2012 18
  • 18. Quelle différence avec la promesse d’origine ?  La promesse part du constat que   Il s’agit alors de considérer le temps comme   les problèmes rencontrés autour de l’accélération  une sorte de ressource naturelle, certes renouvelable, ont beaucoup à voir avec ceux que l’on rencontre dans mais dont la production est par essence limitée. le “développement durable” : le constat  L’objectif est d’abord d’en optimiser l’allocation,   qu’une ressource qu’on croyait infinie ne l’est pas ; à la fois entre les acteurs (division du travail, valori- qu’une exploitation toujours plus intensive ne suffit sation économique...) et dans le temps (actualisation, pas à résoudre le problème, parce qu’elle provoque taux d'utilisation des espaces, des équipements).   toutes sortes d’“effets rebonds”  ; que l’inégalité  Il est aussi d’en réguler l’usage collectif, par exemple de distribution de la ressource fait partie  en donnant un prix aux pollutions (externalités)   intégrante du problème ; que sa gestion est une ou en organisant les différents temps d'un territoire. affaire collective autant qu’individuelle...  Dans l’esprit du développement durable, l’approche économique se met au service du “développement humain”. Elle reconnaît alors l’importance   de la qualité et de l’expérience du temps, ainsi que   le besoin d'une gestion collective du temps   qui permette aux individus de se “retrouver”. R D' H U I OU   réaliser HIER AUJ DE MAIN AP la promesse quelques pistes…  Donner une valeur au temps  Une politique du temps IN RE Et si le temps devenait une unité de valeur S-DEMA Et si l’on imaginait un “droit au temps”, à la à part entière ? On pourrait acheter, offrir, fois dans l’entreprise et en général ? Il pourrait partager du temps. Des “bourses de temps” éten- inclure le “capital-temps” personnel, mais aussi des draient à beaucoup plus grande échelle le principe temps protégés de déconnexion ou d’indis­ onibilité, p de certains Systèmes d’échange locaux dans lesquels un droit opposable à la formation tout au long de la vie une heure de cours de maths vaut (par exemple) une (flexi-sécurité), le droit à des temps sabba­ iques… t heure de plomberie. On mesurerait les “externalités Et si l’on inventait un “chrono-­ rbanisme”, qui viserait u temporelles” des produits (le temps moyen qu’il faut à coordonner les temps et les rythmes au même titre passer à les apprendre, les maintenir, voire à les utili- que l’on gère la diversité des formes de mobilité ? Cela ser) et leur affichage deviendrait obligatoire. Et pour- pourrait devenir l’un des nouveaux métiers des acteurs quoi pas un principe “pollueur-payeur”, par exemple publics. pour l’envoi de mails publicitaires ? Et si l’on choisissait de réinventer quelques moments  Un “capital-temps” à tiroirs réel­ ement collectifs, communs à tous les membres l d’une commu­ auté désireuse de se vivre comme telle n Et si chaque individu naissait avec un “capital-temps”, (un pays, une grande ville, l’Europe ?). Réinventer des égal pour tous – que l’on pourrait, dans une certaine rituels, des ponctuations fortes de l’année ? mesure, exploiter, faire fructifier ou simplement consommer ? Ce capital pourrait se composer de diffé-  Une culture du temps rents “tiroirs”, formation, activités collectives, culture... Et si l’on enseignait le temps, les manières de l’orga- ainsi qu’un tiroir “vierge”, sur lequel la société consi- niser et de le synchroniser, d’en négocier la gestion dère qu’elle n’a aucun compte à demander. Chacun personnelle et collective, de l’employer ou non, de dif- dispo­ erait d’une latitude pour réallouer du temps s férencier temps court et temps long ? entre chaque tiroir, ainsi qu’entre différentes périodes de sa vie. On pourrait augmenter son capital, par exemple en menant des actions d’intérêt collectif, ou en réduire le rythme de consommation, par exemple en ­ onnant et recevant de la formation. En revanche, d on ne pourrait ni acheter, ni vendre ce capital. 19
  • 19. R D' H U I OU   HIER AUJ DE hier, une promesse MAIN AP IN RE S-DEMA La dématérialisation touche toutes sortes de produits. La banque se réduit à déplacer quelques électrons sur un téléphone mobile, comme c’est le cas des cartes, des encyclopédies et des appareils photos, livres, jeux de cartes, chansons, des disques et des lettres – dont aucun n’a plus besoin d’occuper un quelconque espace physique. (…) La dématérialisation du futur inclura la production de viande synthétique, produite en laboratoire sans cerveau, ni jambes, ni entrailles.” Matt Ridley, Wall Street Journal, 2012 Dématérialiser c’est l’occasion de nettoyer toutes les tâches parasites qui n’apportent pas de valeur ajoutée (…) On met le client au centre et derrière on se facilite la vie.” Patrick Fèvre, SNCF, 2011 Si les consommateurs dématérialisent leur usage des objets et si les techniciens produisent ces objets à moindre impact environnemental, la population peut croître en nombre et en richesse sans que son impact environnemental croisse en proportion.” Jesse H. Ausubel, Paul E. Waggoner, 2008 Source : Cato Institute 20
  • 20. R D' H U I OU   HIER AUJ DE à l’heure du bilan MAIN AP ­ La dématérialisation est entrée dans nos Comment offrir de l’immatériel ? Comment IN RE vies quotidiennes. Elle nous simplifie la vie S-DEMA ne pas vivre la dématérialisation comme dans de nombreux domaines, à commencer une dépossession, quand nos acquisitions ne par les paiements et opérations bancaires, les sont que des achats de droits provisoires ? À ces démarches administratives, les transports et le tou- inquiétudes s’ajoute la faible confiance que l’on peut risme. Elle nous permet de ­ voyager léger grâce au accorder aux plateformes à qui sont confiées nos biens cloud. Elle facilite la consultation d’annonces, le par- immatériels et qui exploitent à notre insu nos traces tage de photos, dont nous avons de moins en moins d’usage. Enfin, nombreux sont ceux pour qui la déma- de traces papier ; et des biens culturels aussi courants térialisation est synonyme de dé­ humanisation, voire s que les livres, disques et journaux sont de plus en plus d’exclusion. “immatériels”. Nous y gagnons du temps, de la liberté d’action et de mobilité, du lien social aussi. Les biens La promesse environnementale, également, fait fi- communs et les pratiques de partage se développent. gure de leurre  : les réseaux et les serveurs sont gros conso­ mateurs d’énergie  ; les usagers finissent par m Mais de nombreux nuages viennent assombrir ce pay- imprimer à leurs frais ce que leurs fournisseurs ont sage. Chacun a l’expérience de perte de ­ onnées, de d dématérialisé ; il n’y a pas de commerce en ligne sans photos ou de films importants. Nul ne sait vraiment camions et chaîne logistique. La substitution atten- conserver sur le temps long ses documents adminis- due n’a pas eu lieu. L’hybridation prévaut la plupart tratifs numériques  : l’obsolescence des ­ formats, les du temps  : la dématérialisation permet la rematé- bugs et les accidents informatiques nous guettent. La rialisation, et c’est souvent une bonne ­ ouvelle pour n vie numérique devient synonyme d’un certain désar- l’usager. Les conditions de maîtrise et d’appropriation roi par l’impossible ­ estion des versions de documents, g déterminent l’avenir d’une déma­ érialisation heu- t de l’infobésité, des plateformes multiples. Le gain reuse. fonctionnel peut ­ ’accompagner d’une perte symbo- s lique : quelles archives laisseront les écrivains demain ?  Ce qui a marché… Ce qui n'a pas marché…  Banque en ligne, feuilles de paie   Une accélération du temps difficile à vivre. et factures numériques.  Une plus grande accessibilité à l’information   Apparition de nouvelles fractures cognitives par une démocratisation des outils,  (abstraction). une baisse du coût d’accès, créant en retour   Pouvoir et opacité des algorithmes. de l’abondance.  L’obsolescence des formats, des équipements,    La dématérialisation de la monnaie. la fragilité persistante des systèmes complexes    Des services publics plus efficients  (crash, bug). (mais des dysfonctionnements plus lourds   Les problèmes de mémoire sur le long terme : de conséquences). archivage défectueux, standards changeants.  Concentration de dizaines d’appareils   La dépossession progressive : passage   en un seul smartphone : appareil photo,  de la propriété au droit d’usage. baladeur, magnétophone, boussole…  La captation de valeur : le client est le produit.  Projet Gutenberg, numérisation bénévole   Le cartable numérique. des livres en domaine public.  Dématérialisation = déshumanisation.  Dématérialisation = fin de la rareté =  émergence de biens communs : wikipédia,  logiciels, contenus et services  sous licences libres. 21
  • 21. Ce qui nous a surpris… Ce que nous avons appris…  La vitesse des transformations.  À créer des biens communs différents    L’ubiquité des technologies  des biens publics. et la mobilité des activités qui va avec.  Le monde matériel est toujours là :    Une nouvelle gestion du domicile connecté. il s’est hybridé avec les univers virtuels.  L’ouverture relativement rapide   Ce qui n’est pas dématérialisé peut avoir   des données publiques. une valeur renforcée.  Dématérialisation = partage.  Dématérialisation = dépossession   et captation de la valeur par des grandes   plateformes mondiales. RD'HU OU I J  D HIER AU EMAIN AP demain, ce qui va changer IN RE S-DEMA Poursuite des impacts Technologie de la déma­ érialisation t  Terminaux à tout faire et “intelligence    La dématérialisation appliquée à l’éducation  am­ iante” avec des objets “intelligents” plutôt   b et la formation : les amphis vont continuer  spécialisés. à se vider…  “Cloudification” de l’économie et des services    Allongement de la durée de la vie et problème en même temps qu’une augmentation des capacités d ­ ’archivage de la “longue vie numérique”. de stockage disponibles dans chaque appareil,   sur chaque personne.  Déploiement massif de nouveaux espaces  et ­ ouvelles organisations de travail. n  Réseaux omniprésents et remise en question   de leur neutralité.  Basculement croissant de la propriété à l’accès.  Des données entre ouverture et opacité.  E-administration de proximité.  La rematérialisation via les imprimantes 3D,   l’impression à la demande, l’encre électronique… Le retour de la rareté matérielle  Tension croissante sur les matières premières :   minerais, eau, énergie.  Pénurie des composants informatiques. 22